Elle a eu l’idée de ce projet de film, l’a coproduit, a choisi le cinéaste qui en a assuré la réalisation, et y incarne le rôle le plus important de sa vie d’actrice. Pour Elsa Zylberstein, il y a un avant et un après Simone, le voyage du siècle, un drame biographique consacré à Simone Veil, icône de la vie sociale et politique française.

Jusqu’à maintenant, Simone, le voyage du siècle a attiré dans les salles plus de deux millions de spectateurs en France. C’est dire l’importance qu’a eue Simone Veil, morte il y a cinq ans, et l’empreinte profonde qu’elle a laissée sur la société française. Rescapée d’Auschwitz, cette femme fut de tous les combats, particulièrement ceux liés à la cause des femmes. Ministre de la Santé dans les années 1970, c’est en outre grâce à elle que l’avortement fut dépénalisé dans l’Hexagone. Elle fut aussi la première présidente du Parlement européen.

Très admirative de Simone Veil, Elsa Zylberstein (Il y a longtemps que je t’aime, Un + une) rêvait d’un long métrage sur cette femme depuis une dizaine d’années. Il lui aura fallu du temps, mais son projet s’est enfin concrétisé.

« Le chemin à faire pour aller vers elle, physiquement déjà, fut long, explique l’actrice au cours d’un entretien en visioconférence accordé à La Presse. Ce fut un vrai travail de métamorphose auquel j’ai tout consacré. J’ai même appris à parler comme elle grâce à un programme spécial qu’une école de langue a conçu expressément pour l’occasion. Il fallait que sa manière de parler me soit naturelle. »

Un devoir de transmission

Aux yeux d’Elsa Zylberstein, il est plus pertinent que jamais de raconter la vie de Simone Veil dans le contexte actuel. Transmettre son souvenir aux plus jeunes générations relève également d’un devoir de mémoire.

Avec ce qu’on entend des politiques [politiciens] aujourd’hui, ce film a une résonance hallucinante. Une femme comme elle manque dans notre paysage. Simone parlait juste, parlait vrai.

Elsa Zylberstein

« Elle n’avait pas vraiment d’ambition sur le plan politique, bien que ses combats l’aient menée à en faire. Elle avait surtout un vrai souci des êtres humains et de la dignité humaine », ajoute-t-elle.

PHOTO FOURNIE PAR A-Z FILMS

Scène tirée de Simone, le voyage du siècle dans laquelle Simone Veil (Elsa Zylberstein) s’adresse au Parlement européen

Quand elle a eu le feu vert des producteurs, Elsa Zylberstein s’est vite tournée vers Olivier Dahan, connu notamment grâce à La môme (La vie en rose), pour écrire le scénario du film et en assurer la réalisation.

« À mon sens, il n’y avait que lui pour mener ce projet à terme, indique l’actrice. Ses films ont beaucoup de souffle. Olivier a le sens du romanesque et de l’intime en même temps. Il est en mesure de faire des fresques et de raconter ce genre d’histoire de manière totalement déconstruite. Il a écrit le scénario en allant dans l’émotion et dans l’intime des personnages. Je ne me suis pas trompée. Je savais que c’était pour lui, vraiment. »

Le cinéaste, échaudé notamment par ses divergences artistiques avec Harvey Weinstein à l’époque de Grace de Monaco (avec Nicole Kidman), n’avait pourtant plus envie de faire du cinéma.

PHOTO FOURNIE PAR A-Z FILMS

Elsa Zylberstein incarne Simone Veil dans Simone, le voyage du siècle, un film réalisé par Olivier Dahan.

« Je déclinais tout ce qu’on me proposait, confie Olivier Dahan. Je préférais me consacrer à la peinture. Un jour, Elsa est venue me parler de ce projet sur Simone Veil. Je suis donc allé chercher son autobiographie. Dès les premières pages, elle y raconte ses vacances d’enfance à La Ciotat, ville dans laquelle je suis né et où j’ai grandi. Ça a créé un lien tout de suite. Je n’ai pas essayé de raconter sa vie, mais plutôt de faire écho à sa parole, à ses discours. Parce que son message est important. »

Une confiance totale

Même si elle a agi à titre de coproductrice, Elsa Zylberstein a laissé le cinéaste libre de ses choix.

« J’avais totalement confiance en Olivier, assure-t-elle. Je n’ai pas voulu suivre toutes les étapes de la production, parce que je voulais me concentrer sur mon rôle. Je ne suis pas du tout intervenue dans son travail ni dans aucune décision d’ordre artistique. J’ai monté le projet, mais après, c’est son film. »

Pour la comédienne, incarner sur le cours d’une vie une femme ayant eu un si grand impact sur la société française allait bien au-delà du travail d’actrice.

PHOTO JOHN MACDOUGALL, AGENCE FRANCE-PRESSE

Elsa Zylberstein était présente à la soirée d’ouverture du Festival de Cannes.

Simone m’a aidée à vivre. Elle m’a aidée avec sa force, m’a aidée à supporter des choses. J’ai appris d’elle tous les jours, notamment à rester digne et forte malgré les épreuves.

Elsa Zylberstein

« Ça dépasse le cinéma, ça dépasse l’actrice. J’ai d’ailleurs du mal à m’en défaire. Il m’est même un peu difficile d’avoir du désir pour d’autres films maintenant. Pour moi, il y a assurément un avant et un après », souligne celle qui, depuis, a tourné deux comédies : BigBug (Jean-Pierre Jeunet) et Champagne ! (Nicolas Vanier).

Comme elle s’était consacrée uniquement à son travail d’actrice, Elsa Zylberstein a par ailleurs pu découvrir le long métrage comme si elle était une simple spectatrice.

« Même si je savais que de belles scènes avaient été tournées, j’avais néanmoins une appréhension. Mais j’ai été bouleversée, bluffée. Vraiment. Je ne pourrais en être plus fière. »

Simone, le voyage du siècle est actuellement à l’affiche.