Cinq mille kilomètres. Voici l’impressionnante distance que, chaque automne, les monarques du Québec parcourent pour atteindre le Mexique. Cette fascinante migration est au cœur du film d’animation pour enfants La légende du papillon, qui prend son envol en salle ce vendredi.

Avec ses ailes orange nervurées de noir et tachetées de blanc, le monarque a la faculté d’émerveiller petits et grands. L’acteur Antoine DesRochers se souvient d’ailleurs à quel point il aimait cet insecte quand il était enfant. « À Chambly, il y avait un homme réputé dans le domaine des papillons qui s’appelait Monsieur Papillon. Il faisait des ateliers à l’école, et j’adorais ça », raconte celui qui prête sa voix à Patrick, un monarque aux ailes de tailles différentes, héros du film réalisé par Sophie Roy.

En plus de le replonger dans ses souvenirs d’enfance, le scénario a charmé le jeune acteur puisqu’il mettait en lumière un insecte emblématique d’ici dont l’habitat est menacé. Le printemps dernier, Ottawa a déposé un décret pour que le monarque soit classé comme espèce en voie de disparition en soulignant que ses populations avaient décliné de plus de 50 % au cours de la dernière décennie.

« Le film est une belle opportunité d’amener plus de conscience et d’information sur cette espèce-là », indique l’acteur qui n’hésite pas à joindre sa voix à des causes environnementales. Par le passé, il s’est notamment opposé au projet de gaz naturel liquéfié de GNL Québec.

Matière à réflexion

La légende du papillon n’a cependant rien d’un documentaire. Le film destiné aux enfants du primaire raconte l’aventure d’un monarque incapable de voler et de son ami chenille qui se joindront en cachette à la migration de leurs semblables vers le Mexique.

Une histoire de fiction peut-elle jouer un rôle dans la lutte contre les changements climatiques ? Antoine DesRochers croit qu’en montrant des problèmes précis, un long métrage pour enfants peut apporter matière à réflexion.

« Par exemple, dans le film, il y a une scène où les papillons arrivent dans un lieu où chaque année, ils se retrouvaient pour se reposer, pour pouvoir manger de l’asclépiade. Là, il y a un centre d’achats », illustre-t-il.

Ça, c’est une chose concrète à laquelle on peut réfléchir dans les municipalités. A-t-on besoin d’un nouveau centre d’achats ?

Antoine DesRochers

L’important rôle que joue l’asclépiade dans la vie des monarques est d’ailleurs l’élément principal que la réalisatrice Sophie Roy souhaiterait que les enfants (et leurs parents) retiennent après le visionnement du film.

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

Sophie Roy, réalisatrice

« Je veux qu’ils sachent que cette fleur-là est super importante pour la survie des monarques. Ça leur donne ensuite le pouvoir de dire : “Maman, papa, je veux aller chercher un plant d’asclépiades et le mettre dans le jardin.” Quand on est capable d’agir sur un problème, on ne se sent pas défait. On est dans l’action », soutient, avec enthousiasme, la réalisatrice qui signe son premier film.

Mais attention : il n’est pas question pour Sophie Roy de faire la morale. Le message environnemental, elle ne le souligne pas à gros traits. Elle préfère laisser parler les images, comme dans cette scène où l’on voit défiler de nombreuses cours de banlieue gazonnées. Lorsque les insectes en croisent enfin une avec des fleurs, ils sont aux anges.

Des personnages « vrais »

Même s’il s’agit d’un film d’animation dans lequel on suit des papillons qui parlent, Sophie Roy souhaitait que ses personnages soient « le plus vrai possible » afin que les enfants puissent s’identifier à eux. Elle voulait notamment comprendre la réalité des jeunes qui, comme Patrick, vivent avec un handicap.

Pour ce faire, alors que le projet de film n’en était qu’à ses débuts, la réalisatrice a rencontré des enfants et des parents à travers la Fondation Papillon, organisme qui aide les personnes en situation de handicap.

Je me suis fait un cahier dans lequel j’ai écrit leur feedback et je me suis dit : “Ces éléments, tu n'y touches pas. Ces enfants t’ont dit que c’était important.”

Sophie Roy, réalisatrice

Si les voix des personnages, interprétés notamment par Catherine Brunet, Sophie Cadieux et Ludivine Reding, ont un accent très québécois, c’est aussi pour que les jeunes cinéphiles se reconnaissent, indique Sophie Roy.

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

Catherine Renaud, Fayolle Jean Jr, Sophie Cadieux, Ludivine Reding, Madeleine Sarr, Julie Le Breton, Antoine DesRochers, Rodley Pitt et Catherine Brunet prêtent leur voix aux personnages de La légende du papillon.

« Le groupe d’âge ciblé ne doit pas se poser de questions sur qu’est-ce que ça veut dire, ce mot-là, sinon il risque de décrocher. […] On met tout de l’avant pour que l’enfant sente que le film est à lui », fait valoir celle qui, auparavant, a été productrice déléguée pour les films La guerre des tuques 3D et La course des tuques, dans lesquels on entend aussi l’accent d’ici.

Traduit dans près d’une quarantaine de langues, La légende du papillon sera également présenté au Canada anglais, en France et en Allemagne, notamment.

En salle

Immersion parmi les papillons

Au cinéma, les spectateurs pourront découvrir La légende du papillon de trois façons : sur un écran traditionnel, avec des lunettes 3D ou en Screen X. C’est la première fois qu’un film canadien est produit pour être diffusé dans ces salles, encore rares au pays, dans lesquelles l’action ne se déroule pas seulement devant soi, mais aussi autour grâce à deux écrans latéraux. « Quand on est assis dans le cinéma, on fait vraiment partie du film », illustre la réalisatrice Sophie Roy. Pour son équipe, ce fut tout un défi. De nombreuses animations supplémentaires ont été nécessaires pour donner vie à ces deux écrans de plus pendant environ le tiers du film. Au Québec, les salles équipées de cette technologie se trouvent dans les cinémas Cineplex de Brossard, Laval et Sainte-Foy (Québec).