Ce n’est pas tous les jours qu’une cérémonie de remise de prix renaît après avoir été considérée comme morte et enterrée. La Presse a organisé une table ronde avec les architectes du retour du Gala Québec Cinéma. Compte rendu.

Rebondir

Octobre 2022. Radio-Canada annonce qu’elle débranche le Gala Québec Cinéma, qu’elle présente depuis 2003. À Québec Cinéma, l’organisme responsable de la cérémonie, la surprise est totale.

Dominique Dugas, directeur général de Québec Cinéma : « C’était assez soudain. La directrice générale en place, Sylvie Quenneville, s’est tout de suite activée auprès du milieu. Des personnes sont allées rencontrer le ministre [Mathieu] Lacombe. »

Suzane Landry, vice-présidente, Développement de contenu, programmation et information chez Bell Média (Noovo) : « Quand Radio-Canada a laissé tomber le gala, Québec Cinéma m’a rencontrée. Je n’ai pas été difficile à convaincre. Parce que c’était une association naturelle. Bell Média est partenaire des Rendez-vous Québec Cinéma depuis longtemps. On achète une vingtaine de films québécois par année pour alimenter nos plateformes. Et plus que jamais, c’est important de célébrer notre cinéma. Pour convaincre les gens d’aller voir des films québécois, il faut leur donner une vitrine.

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Dominique Dugas, directeur général de Québec Cinéma

Dominique Dugas, Québec Cinéma : « Sylvie Quenneville et Patrick Roy, le président du conseil d’administration, ont travaillé fort pour trouver une solution. Le défi, c’était de passer d’un diffuseur public comme Radio-Canada, qui assumait à 100 % les coûts de production du gala, à une chaîne privée, comme Noovo, qui devait mettre en place une structure pour financer la cérémonie. »

Suzane Landry, Bell Média : « Québec Cinéma avait engagé des démarches auprès du gouvernement. Ils avaient une solution financière. »

Appel d’offres

Printemps 2023. Bell Média lance un appel d’offres aux boîtes de production pour ressusciter le Gala Québec Cinéma. Sphère Média (Les petits tannants, Belle et bum) remporte la mise en proposant une cérémonie pilotée par Jay Du Temple, un spécialiste en matière de relance d’émissions, après avoir donné un second souffle à Occupation double en 2017. En août, le gouvernement du Québec annonce qu’il accorde 600 000 $ au Gala pour soutenir son redéploiement au petit écran.

Marie-Pier Gaudreault, productrice exécutive, variétés, chez Sphère Média : « On s’est arrimés avec l’ADN de Noovo. On voulait quelque chose d’inclusif, qui parle autant aux cinéphiles qu’aux gens qu’on aimerait amener au cinéma. »

Suzane Landry, Bell Média : « On voulait un gala moderne, rassembleur et festif. »

Marie-Pier Gaudreault, Sphère Média : « Jay [Du Temple] avait toutes les qualités requises pour animer cette soirée. Pour moi, c’était un no-brainer [une évidence]. C’est la seule et unique personne que j’ai appelée. »

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L’humoriste et animateur Jay Du Temple

Jay Du Temple, animateur : « J’étais surpris [qu’on me contacte]. Mais rapidement, mon cerveau s’est mis à chercher des idées… Visiblement, il y avait quelque chose qui m’attirait. Mon corps m’envoyait un signal. Le peu d’hésitation que j’ai eue, c’est par rapport au milieu du cinéma : est-ce qu’il était d’accord que j’anime son gala ? »

Dominique Dugas, Québec Cinéma : « On s’est souvent fait reprocher de proposer une émission pour l’industrie. Dans cette optique, revenir avec quelqu’un comme Jay aux commandes, c’était logique. On remet le public au centre de l’équation. »

Jay Du Temple, animateur : « J’ai rencontré plusieurs acteurs et actrices au cours des dernières semaines. Ils ont tous été super généreux avec moi. Ils étaient rassurants, gentils. Je sens beaucoup de soutien. »

Contexte difficile

Les galas ne l’ont pas eu facile au cours des dernières années. Au Québec, TVA a délaissé les prix Artis, les auditoires fléchissent, les critiques remettent en question la pertinence des cérémonies du genre… Le contexte dans lequel s’inscrit le retour du Gala Québec Cinéma n’a pas freiné l’enthousiasme de Jay Du Temple. Au contraire.

Jay Du Temple : « Quand tu viens d’animer six saisons d’OD, la critique des galas, elle n’est pas stressante. Et j’aimais le côté défi, le côté “ce n’est pas gagné d’avance”. Je trouve ça riche. Ce n’était pas juste une année de plus dans l’histoire d’un gala qui roule déjà. »

Suzane Landry, Bell Média : « On vient de traverser deux ans de pandémie. Les galas qu’on a faits durant cette période n’avaient évidemment pas l’émotion, la saveur, la couleur qu’ils avaient avant. »

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Melanie Bhérer et Suzane Landry, de Bell Média

Mélanie Bhérer, directrice générale, variété, style de vie, documentaire, chez Bell Média : « Toutes les décisions qu’on a prises, y compris le choix de l’animateur, c’était toujours en pensant au public. C’est notre ligne directrice. »

Préparatifs

Les préparatifs du Gala Québec Cinéma vont bon train depuis plusieurs mois. Tous s’entendent pour dire qu’il s’agit d’un travail colossal pour deux heures de télévision, qui comprendront notamment un hommage à Rémy Girard, ainsi qu’une célébration des 25 ans de l’évènement.

Roxane Couture, productrice au contenu chez Sphère Média : « Comparativement à d’autres galas, les gens n’ont pas nécessairement tout vu. Il faut mettre de l’avant ce qu’ils connaissent. Le cinéma, on croit parfois que c’est niché, mais c’est faux. Il y a plein de films super accessibles. Il suffit de mettre un pied dans la porte pour avoir envie d’en voir d’autres. »

Jay Du Temple : « Je pense aux gens du milieu du cinéma jour et nuit depuis l’été. Ça n’a aucun sens ! »

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Marie-Pier Gaudreault, productrice exécutive, variétés, chez Sphère Média

Marie-Pier Gaudreault, Sphère Média : « On parle de renaissance du gala, mais pour nous, c’est une naissance. Point. On crée quelque chose de complètement nouveau. »

Compte à rebours

L’équipe chargée de la cérémonie investira les Studios Grandé à Montréal lundi pour terminer les préparatifs. Le deuxième tour du vote ayant pris fin dimanche dernier, Québec Cinéma connaît les gagnants depuis quelques jours seulement. Pour Jay Du Temple, il s’agit d’une période stressante.

Roxane Couture, Sphère Média : « Il reste beaucoup de travail, mais c’est excitant ! Les morceaux du casse-tête s’attachent. Le gala prend forme… On veut arriver au 10 décembre convaincus qu’on a fait tout ce qu’on pouvait faire pour donner le meilleur show possible. »

Jay Du Temple : « Je m’en demande beaucoup, et par conséquent, j’en demande beaucoup à Guillaume Girard et à David Beaucage. Ce sont mes meilleurs amis. On travaille souvent ensemble. Ils font preuve de beaucoup de patience avec moi, parce que j’en manque tellement… Mon but, c’est d’arriver en forme le jour du gala. Je veux que mon kit soit prêt, que mes jokes soient prêtes… Je veux être de bonne humeur. »

Mélanie Bhérer, Bell Média : « Avec toute la pression que Jay peut ressentir, il reste tellement rassurant. C’est un leader positif incroyable. »

Jay Du Temple : « Je veux que tout le monde chez Bell Média, Sphère Média et Québec Cinéma soit content. Je veux que ma mère soit contente. Je veux que toute l’industrie du cinéma soit contente. Je veux que Rémy Girard soit content. Mais l’important, c’est qu’on pique la curiosité des gens. Je veux qu’on leur donne envie d’aller voir des films québécois. »

Noovo diffuse le 25Gala Québec Cinéma le dimanche 10 décembre à 20 h.