Les frangins des 3 p’tits cochons ont subi une métamorphose. Un relookage complet qui s’expose dans Filière 13, où ils sont maintenant collègues de travail - dans un poste de police. Au gré de l’inspiration des scénaristes Claude Lalonde et Pierre Lamothe, les cochons sont donc devenus des «bœufs». Pour les mettre au pas, le même chef de troupe (au): Patrick Huard. Dont l’une des missions était de réaliser, avec les mêmes ingrédients devant et derrière la caméra, une autre recette qui obtiendrait la faveur populaire. Rencontres.

Au départ, il y a eu un souper. Non, au départ, il y a eu le succès des 3 p’tits cochons. Non, non! Au départ, il y a eu les liens formés pendant le tournage du film scénarisé par Claude Lalonde et Pierre Lamothe, réalisé par Patrick Huard, produit par Pierre Gendron, mettant en vedette Claude Legault, Guillaume Lemay-Thivierge et Paul Doucet dans la peau de trois frangins très-différents-mais-peut-être-pas-tant-que-ça-dans-le-fond.

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Les trois comédiens et le réalisateur se sont entendus comme larrons en foire et désiraient retravailler ensemble. Oui, c’est un cliché: ils et elles disent tous cela au moment de la promotion d’un film. Mais les clichés ont, parfois (souvent?), un pied dans la réalité - comme le prouve la réapparition de ce beau monde dans Filière 13.

Retour au souper. Deux semaines après la sortie et le succès des 3 p’tits cochons. C’était il y a trois ans. Autour de la table, les deux auteurs mentionnent un autre scénario qu’ils ont écrit. Une comédie policière. Bientôt, l’idée est lancée. Et si la même gang refaisait équipe pour porter cette histoire-là à l’écran?

Un vœu, peut-être pieux, peut-être pas. Mais la bouteille était lancée à la mer. Bien bouchée car elle n’a pas coulé malgré la houle, et arrivera à bon port mercredi - puisque Filière 13 prend l’affiche ce jour-là. Et sur ladite affiche se trouvent, en gros, les mêmes noms que sur celle des 3 p’tits cochons.

Bref, Patrick Huard a pris les rênes de cette histoire de trois flics aux prises avec de (gros) problèmes. De policiers catégorie A qu’ils étaient, la vie les a fait débouler au statut d’équipe B.

Thomas (Claude Legault) est un vieux routier, un dur, un pro, maintenant aux prises avec des maux de tête violents - ce qui lui fait commettre l’impensable: oublier un prisonnier dans sa voiture, par jour de canicule en plus.

Jean-François (Guillaume Lemay-Thivierge) est le visage - et le sourire, et les dents - de la police, puisqu’il en est le porte-parole auprès des médias... jusqu’au jour où il perd tout - pas les dents, mais le sourire et son poste, parce que foudroyé par la phobie sociale.

Aux prises avec une séparation qu’il gère mal, Benoît (Paul Doucet) est leur supérieur et il les «condamne»à une mission dont personne ne veut - surveiller l’appartement où vit la mère d’un bandit (Daniel Boucher) - mais qui les mènera sur les traces d’un sombre personnage impliqué dans le scandale des commandites (Jean-Pierre Bergeron).

«L’histoire est différente mais je voulais aussi que, visuellement, Filière 13 ne ressemble pas aux 3 p’tits cochons et que l’énergie et le rapport entre les trois personnages principaux ne soit pas la même», fait Patrick Huard.

Nerf de «boeuf»

Il a donc laissé de côté les plans fixes et le rythme lent des «cochons»pour adopter un nerf de «bœuf»: «Au début, je voulais quelque chose d’assis, de stable, qui se referme lentement sur les personnages jusqu’au point où ils n’en peuvent plus. Et trois minutes après que ce soit «trop»pour eux, comme pour les spectateurs, tout ça explose.» Les policiers en dérive deviennent proactifs, l’action déboule, tout le  monde respire mieux tout en étant hors d’haleine - puisque ça court et ça se bat.

Et quand il parle de cela, de cette vision, de ses intentions, Patrick Huard est réalisateur. Ce n’est pas un rôle, c’est lui dans sa peau de réalisateur. Il en change pour devenir acteur ou scénariste ou producteur. Oui, il occupe tous ces fauteuils-là dans l’aventure télévisuelle de Taxi 0-22 - qu’il a rangé au garage pour l’instant. Mais pas quand il vise le grand écran: acteur dans Les Boys, Sur le seuil ou encore Cadavres, il a coscénarisé Bon Cop, Bad Cop dans lequel il tient l’un des deux rôles principaux mais s’est «contenté»de rester derrière la caméra pour Les 3 p’tits cochons et Filière 13.

Pas question pour lui de jouer la sainte trinité scénariste-réalisateur-acteur. «Avant que je réalise un film dans lequel je jouerais aussi, il va falloir que notre mode de tournage change, explique-t-il. Je ne crois pas que je puisse être aussi efficace des deux côtés de la caméra en même temps si je n’ai que 30 jours de tournage. Alors, si un jour, un scénario m’arrivait et que - je sais que ça va sembler bizarre, mais bon... - que je pensais être le meilleur acteur pour le rôle et le meilleur réalisateur pour le diriger, et si on me donnait 60 à 70 jours pour le filmer, j’y penserais.»

Une fonction à la fois

Mais ce n’est même pas quelque chose qu’il recherche. Parce qu’il est pleinement heureux de se donner à 100% dans l’une des fonctions.

«J’aime beaucoup le feeling de marcher sur un plateau de tournage dans la peau d’un autre être humain, d’avoir à me concentrer là-dessus et de rendre la vision d’un réalisateur. J’aime aussi beaucoup le feeling de marcher sur un plateau de tournage, la barbe pas faite, les yeux cernés, un t-shirt troué et de me demander comment je peux aider tout ce monde à se surpasser, sans penser à moi», poursuit-il, convaincu que s’il devait faire «les deux jobs à la fois», il ne verrait que les côtés déplaisants de chacun.

Ces côtés ennuyeux qui pourraient atterrir dans la fameuse filière 13. Et il n’est pas question pour Patrick Huard d’en faire un mode de vie. Un film, par contre...

Filière 13 prend l’affiche le 4 août.