Chaque semaine, un de nos journalistes vous présente un essai récemment publié.

Le forestier allemand Peter Wohlleben a acquis une renommée mondiale en 2015 avec la publication de La vie secrète des arbres, un ouvrage où il expose de façon très charismatique (et critiquée pour ses raccourcis et son anthropomorphisme) la façon dont les arbres communiquent entre eux. Porté par cette popularité inhabituelle pour un forestier, il a depuis écrit plusieurs autres ouvrages sur la nature, les animaux et la forêt, dont le plus récent : Des forêts pour sauver le climat.

Dans cette autre déclaration d’amour aux arbres, il expose leur grande capacité d’adaptation et leur pouvoir de nous aider à relever le plus grand défi du XXIe siècle : celui des changements climatiques. Pour lui, le destin des forêts et celui de l’humanité sont liés. Alors qu’Elon Musk a offert 100 millions de dollars à ceux qui trouveront la meilleure solution de récupération et de stockage de carbone, Peter Wohlleben nous dit que cette solution est sous nos yeux. Les arbres sont « notre meilleur allié pour chasser les gaz à effet de serre de notre atmosphère ». En plus, ils rafraîchissent la température (une étude allemande a montré que la température à Berlin était de 15 °C plus élevée que dans une forêt ancienne) et ils augmentent le volume de précipitations. Encore faut-il qu’ils survivent aux épisodes de sécheresse qui seront de plus en plus nombreux.

Ce que le forestier démontre, c’est qu’ils savent s’adapter si on leur laisse le temps. Dans La vie secrète des arbres, il expliquait comment ces grands végétaux peuvent apprendre et retenir leur savoir, voire le transmettre à leurs descendants par leurs graines. Or, en retirant les vétérans de nos forêts, pour les remplacer par de jeunes pousses, on court-circuite cette transmission.

Très critique envers l’exploitation forestière, il dénonce le remplacement des forêts anciennes par des plantations d’essences à croissance rapide, la compaction des sols par le passage de la lourde machinerie et la destruction de forêts au profit de l’agriculture, principalement la monoculture.

Mais quand on coupe un arbre pour en faire un meuble, un nouveau prend sa place et poursuit l’absorption du carbone, non ? Peter Wohlleben démolit cet argument en arguant que si on ne l’avait pas abattu, l’arbre aurait continué à grandir et à emmagasiner du carbone à un rythme accru, puisque ce sont les arbres âgés qui absorbent le plus de gaz à effet de serre.

Si l’idée de laisser les arbres tranquilles semble pleine de bon sens, elle se heurte aux limites de la réalité et des besoins de la société actuelle, qu’il faut diminuer, certes, mais l’auteur évacue rapidement cette préoccupation, exaspéré par cette question : « Mais alors, d’où viendra le bois ? »

Au regard du lecteur québécois, une autre faiblesse du livre est son accent mis sur l’industrie forestière allemande. Faisons-nous mieux au Québec ? Il faudra trouver la réponse ailleurs.

Extrait

« Même dans de bonnes conditions, une forêt primaire a besoin de voir s’épanouir au moins une génération d’arbres sans que l’homme vienne la déranger avec des tronçonneuses. Ce qui représente, en fonction des essences concernées, de nombreux siècles. Mauvaise nouvelle pour les êtres impatients que nous sommes. »

Qui est Peter Wohlleben ?

Vulgarisateur écologiste, Peter Wohlleben est garde-forestier d’une forêt publique en Allemagne. En 2017, il a créé l’Académie de la forêt, vouée à la production de matériel pédagogique sur l’écologie forestière. Il a publié une dizaine d’ouvrages, dont La vie secrète des arbres, qui s’est vendu à plus de deux millions d’exemplaires.

Des forêts pour sauver le climat

Des forêts pour sauver le climat

Éditions MultiMondes

272 pages