Qui va dominer l’actualité politique au pays en 2024 ? Facile ! Ce sera Donald Trump. Parce que le Canada va passer l’année à se demander ce qu’il devrait faire, surtout si Trump était réélu.

L’élection américaine de novembre sera sans doute la seule affiche politique en 2024. Il serait surprenant que les Canadiens ou les Québécois soient appelés aux urnes avant 2025. Et la capacité de Donald Trump de faire les manchettes reste inégalée.

Le résultat de l’élection américaine est loin d’être assuré, on y reviendra un peu plus loin. Mais la préparation du Canada et des provinces – surtout si M. Trump devait l’emporter – est déjà commencée.

Pas question, cette fois-ci, de se faire surprendre par une obligation de renégocier l’Accord de libre-échange Canada–États-Unis–Mexique, qui a mobilisé toutes les administrations fédérale et des provinces pendant 18 mois. Mais toute négociation commerciale, même si elle n’est pas de cette ampleur, consommera beaucoup d’énergie.

Quoi qu’il advienne, la gestion des relations du Canada avec son gigantesque voisin sera toujours un enjeu essentiel pour le gouvernement fédéral. Comme l’a déjà dit l’ancien premier ministre Paul Martin, « la première responsabilité du premier ministre du Canada est de s’assurer que la frontière avec les États-Unis demeure ouverte ».

La bonne nouvelle, c’est qu’il serait étonnant que M. Trump répudie un traité de libre-échange qu’il a lui-même signé. Et de son côté, le Canada serait bien mieux préparé si cela devait arriver.

Mais cela ne signifie pas que tout sera au beau fixe sur le plan des relations commerciales entre les deux pays.

M. Trump aime à se décrire comme « l’homme des tarifs » et il pourrait y avoir des conflits commerciaux limités, comme sur le commerce des produits laitiers, un vieil irritant entre les deux pays.

Un des enjeux majeurs qui risque de diviser les deux pays est la question de l’environnement. Donald Trump avait fait sortir les États-Unis de l’Accord de Paris sur les changements climatiques, Joe Biden les a fait revenir, et il est presque certain qu’un président Trump réélu quitterait l’accord à nouveau.

Pour le Canada, qui est un farouche partisan de cet accord – au moins sous l’administration actuelle –, ce serait un problème majeur dans les relations tant bilatérales qu’internationales. (En passant, le chef conservateur Pierre Poilievre a indiqué qu’il ne propose pas de répudier l’Accord de Paris.)

Autre sujet de friction Canada–États-Unis : la place de l’OTAN et la défense nationale. M. Trump a souvent dénoncé les pays membres de l’OTAN qui ne dépensent pas assez pour leur défense nationale et se fient trop sur les États-Unis pour assumer une part démesurée de la facture.

Le Canada a beau être un fidèle membre de l’OTAN, il n’en demeure pas moins qu’il est loin des objectifs fixés en matière de défense. En 2023, le Canada y aura dépensé 1,29 % de son PIB, donc bien en deçà de la cible des 2 %. Atteindre cette cible signifierait des dépenses que le gouvernement Trudeau refuse d’engager, ainsi qu’il l’a expliqué à ses partenaires.

Pour les États-Unis, quel que soit le parti au pouvoir, c’est toujours un irritant dans la relation bilatérale. Mais il est à prévoir que M. Trump sera tenté d’en faire un enjeu important.

Cela dit, le Canada aura beau se préparer à toute éventualité, la décision finale appartiendra aux électeurs américains. Et les jeux sont loin d’être faits. Les sondages sont de peu de secours à ce point-ci. Si on fait la moyenne, ils indiquent une avance d’environ deux points de M. Trump sur le président Biden, ce qui est dans la marge d’erreur.

De toute façon, ce qui compte, c’est le Collège électoral, où la situation est encore moins certaine que dans les sondages.

Par ailleurs, l’économie américaine se porte mieux. L’inflation est à la baisse, et les chiffres de l’emploi de décembre 2023 ont largement dépassé les prévisions pour un taux de chômage de 3,7 % (contre 5,8 % au Canada). Sauf que les sondages indiquent aussi que les Américains croient majoritairement que leur pays est en récession.

Autre facteur important, toutes les élections aux États-Unis depuis la décision de la Cour suprême sur l’avortement ont montré une meilleure performance des démocrates que ne l’indiquaient les sondages. Clairement, c’est une question qui fait sortir le vote démocrate, traditionnellement plus enclin à l’abstention.

Autre élément imprévisible, la possible condamnation de Trump sur l’un des 91 chefs d’accusation criminelle qui pèsent sur lui. Certains des procès auront lieu avant les élections de novembre, forçant le candidat à passer des assemblées de campagne au banc des accusés.

Enfin, M. Biden a 81 ans, mais M. Trump aura 78 ans le jour de l’élection présidentielle. Mais l’âge n’est pas la raison qui fait que beaucoup d’Américains – et de Canadiens – auraient préféré autre chose qu’un match revanche Biden-Trump. On craint bien plus la mise de l’avant par les deux candidats de solutions qui proviennent tout droit du siècle dernier.