C’est l’équivalent, pour Donald Trump, du supplice de la goutte d’eau.

À chaque séance des auditions publiques de la commission sur le 6-Janvier, l’ancien président républicain doit assurément rager et... souffrir. Pour un politicien qui pourrait annoncer d’ici quelques semaines qu’il briguera de nouveau la Maison-Blanche en 2024, c’est de la torture.

Chaque fois, on a droit à de nouvelles révélations aussi accablantes les unes que les autres, visant à démontrer que Donald Trump et certains de ses alliés ont eu un comportement criminel.

Comment ne pas croire, désormais, que l’insurrection du 6 janvier 2021 à Washington a été l’aboutissement d’une stratégie longuement mûrie par l’ancien président et les membres les plus cinglés de sa garde rapprochée ?

Comment ne pas croire que Donald Trump était prêt à rester au pouvoir coûte que coûte ?

Même si ça voulait dire bloquer la certification des résultats du scrutin de novembre 2020. Même si ça devait impliquer de la violence. Même si ça voulait dire que la démocratie américaine n’allait pas s’en remettre de sitôt.

La plus récente séance, mardi dernier, était la septième de cette série (et possiblement l’une des dernières). Elle a permis de comprendre à quel point l’appel lancé le 19 décembre 2020 sur Twitter par Trump à ses fidèles pour la tenue d’une « grosse manifestation » à Washington a servi de catalyseur à l’insurrection.

Dès la publication de ce tweet, de nombreux responsables et membres de groupes d’extrême droite ont commencé à s’enfiévrer et à se coordonner pour assurer le succès de cette manifestation.

Le tweet a été perçu par certains partisans de Donald Trump comme « un appel aux armes », selon les membres de la commission.

Diverses preuves dévoilées mardi ont aussi montré que le président, dans les jours qui ont précédé la manifestation du 6 janvier 2021, avait déjà décidé qu’il allait exhorter ses partisans à marcher sur le Capitole.

« L’objectif du président était de rester au pouvoir pour un deuxième mandat en dépit du fait qu’il avait perdu l’élection. La foule rassemblée était un des outils pour atteindre cet objectif », a résumé l’une des neuf membres de la commission, l’élue démocrate Stephanie Murphy.

Avec tout ce qu’on a entendu depuis le début de ces auditions publiques, il est difficile de lui donner tort.

Les révélations les plus troublantes jusqu’ici ont été celles de Cassidy Hutchinson, précieuse assistante du chef de cabinet de la Maison-Blanche Mark Meadows, lui-même un fidèle allié de Trump.

Écœurée par ce à quoi elle avait assisté, elle s’est mise à table. Elle a notamment allégué que le président savait, avant d’encourager ses partisans à se rendre au Capitole, que plusieurs d’entre eux étaient armés. Il se serait même mis en colère parce qu’on ne les laissait pas accéder à l’endroit où il prononçait son discours sans les faire passer par un détecteur de métal.

Cassidy Hutchinson a aussi raconté que le président avait fait pression sur les agents responsables de sa sécurité pour qu’il puisse lui aussi aller au Capitole.

Ce qui est de plus en plus clair, également, c’est que bon nombre de ceux qui ont joué un rôle dans cette tentative de coup d’État étaient conscients de la nature de leurs abus. Près d’une dizaine auraient tenté d’obtenir la grâce présidentielle avant que Donald Trump ne quitte le pouvoir.

Comme leur président, ils étaient aussi perfides que dangereux.

Réjouissons-nous, le travail de la commission semble avoir fait pâlir, un peu, l’étoile de l’ancien président républicain.

Un récent sondage (New York Times – Siena College) indique que près de la moitié des républicains auraient l’intention de voter pour un autre candidat que lui à la prochaine saison des primaires républicaines.

N’empêche que Donald Trump demeure, de loin, le plus populaire de tous les éventuels prétendants. Il récolte 49 % des intentions de vote, comparativement à 25 % pour son plus proche rival, le gouverneur de la Floride, Ron DeSantis.

Si la démocratie américaine était en bonne santé, la très large majorité des Américains, démocrates et républicains confondus, aurait depuis longtemps désavoué l’ancien président. Il conserve pourtant des dizaines de millions de partisans. C’est tout sauf une bonne nouvelle.

La journaliste Mélanie Marquis nous a appris récemment que de ce côté-ci de la frontière, avant même la présidentielle américaine de 2020, le gouvernement fédéral craignait des contrecoups au pays.

On n’a pas fini de s’inquiéter.

Il nous reste à espérer que la suite du travail de la commission continuera d’éroder le soutien dont bénéficie encore Donald Trump. Et qu’il ne s’en sortira pas sans payer, cette fois, pour les conséquences de ses actes.

Consultez le site de la commission (en anglais)