Elle est à 25% chinoise par son grand-père; à 25% Pepsi par sa grand-mère Émilia de Terrebonne; à 50% slovaque par son papa, et à 100% folle, pas folle débile, folle sautée, et tellement éparpillée, Loulou, Loulou, je ne te suis plus...

Elle s'appelle Loulou. Louise Makovsky.

L'autre jour, la fille d'un ami s'est fait voler son sac d'école dans son auto. Il y avait dedans des travaux importants. Les voleurs ont jeté le sac dans un parc. Mon ami a reçu deux jours plus tard un appel de Loulou: bonjour monsieur, mon cochon a retrouvé votre sac d'école.

Loulou a un cochon vietnamien toujours le groin à terre, c'est comme ça qu'il retrouve plein de trucs dans les parcs et les rues de Montréal, des portefeuilles, une perruque, le Coran en braille, un sifflet d'arbitre de soccer, un toaster tout neuf encore dans sa boîte, une pompe à bicyclette, des gants, un chapeau tyrolien, un caleçon d'homme, une robe d'enfant avec des soleils, et plein d'autres choses qui font comme un inventaire des petites choses de la vie.

Loulou dit que son cochon a des dons. Sauf que moi aussi, j'ai déjà trouvé un caleçon d'homme dans le parc La Fontaine et je n'ai aucun don. Bref, mon ami est allé récupérer le sac de sa fille chez Loulou qui l'a tiré au tarot. Loulou tire au tarot entre autres occupations, elle te demande d'abord ce que tu veux savoir, si tu ne veux rien savoir de particulier, elle ne te dit rien de particulier, si tu veux savoir des trucs, elle te dit des trucs. Si tu veux gagner à la loterie, tu lui dis combien, elle prend 5%. Je niaise.

Je l'ai avertie d'entrée: madame Loulou, si tu veux qu'on soit amis, pompe-moi pas avec l'ésotérisme. Le tarot, le reiki, la guérison par les essences de fleurs, les bonnes et les mauvaises énergies, l'interprétation des rêves, les vibrations, l'enfant intérieur, les vies antérieures, ça me donne des boutons. Je suis venu voir ton cochon, allons voir ton cochon.

Louise habite un très grand appartement sur le Plateau où elle a été élevée. Dans le vestibule, un premier chien, un épagneul, trouvé il y a une dizaine de jours rue Sherbrooke, juste à voir la fête qu'il fait à Loulou, on le devine pas très pressé de retrouver ses maîtres.

Dans la chambre à droite, Crissie, une chienne boston terrier, en convalescence de patte brisée, placée chez Loulou par le refuge Gerdey's, bientôt disponible pour l'adoption.

Au bout du vestibule, une porte s'ouvre sur un long couloir où galopent deux golden doodle blancs et frisottés, martyrs rescapés des usines à chiots. Dans le bureau de Loulou, des oiseaux, un perroquet trouvé rue Prince-Arthur sur une rampe d'escalier, un inséparable (love bird), des pinsons et des canaris. Dans la pièce suivante, Bella, un labra-doodle en pension.

Toujours dans le couloir, sur un sofa, indifférents, deux siamois, Ming et Perle, un autre vient de filer vers la cuisine. Attenante à la cuisine, une chambre qu'on a vidée de ses meubles - sauf la télé! -, le domaine exclusif de Clooney le cochon vietnamien, bestiau de plus de 150 livres aux soies toutes raides sur le cou qui lui donnent un petit air féroce.

Es-tu sûre qu'il ne va pas m'attaquer, ton sanglier? Regarde comme il me pousse du groin. On dirait qu'il veut quelque chose. Elle est allée chercher des abricots séchés dans la cuisine: tiens, c'est ça qu'il veut. Il veut aussi son amie Bella, la labra-doodle. Bella est arrivée, le cochon et elle se sont mis à jouer comme des enfants.

Récapitulons, dans cet appartement du Plateau, une tireuse de tarot, cinq chiens, un cochon de plus de 150 livres, trois chats, des oiseaux et vous ne le croirez pas: pas une odeur, cela ne sent pas le chien, ni le cochon, ni le pipi. La chambre du cochon est plus propre que celle de votre ado, Loulou a entraîné ses bêtes à aller faire leurs petites et moins petites affaires dehors...

Lequel de tes bestiaux t'aime le plus?

Le perroquet est complètement fou d'amour. Après, il y a Ming, un des chats siamois. Puis le cochon et Lotus, le golden doodle qui est encore bébé.

Et toi?

Je les aime tous...

Tu peux bien me dire, ils ne liront pas la chronique de toute façon...

Je n'ai pas de préférence. Ce sont mes enfants. Il n'y a pas longtemps, je croyais avoir trouvé un endroit pour placer mon cochon, cela ne s'est pas fait, mais tout le temps que j'ai pensé qu'il partirait, je pleurais et je pleurais.

Un chien? Un chat? Un cochon?