De passage à Paris la semaine dernière, le maire de Québec, Régis Labeaume, a déploré l'abondance d'affiches en anglais dans la capitale française: «C'est sidérant de voir la publicité ici. On ne pourra pas avoir une francophonie en santé si on ne décide pas de réfléchir à ça.»

Le maire Labeaume a moins été frappé par la présence des raisons sociales des grandes chaînes américaines que par la multiplication des expressions anglaises (smart phones et autres must) dans les vitrines des petits commerces.

À Montréal aussi, on le sait, l'affichage commercial en anglais pose problème. Malgré les campagnes de sensibilisation, malgré le zèle des mouvements militants, trop de commerçants continuent d'ignorer les exigences de la Charte de la langue française.

Quelques jours avant le séjour parisien de M. Labeaume, l'Office québécois de la langue française (OQLF) a lancé une campagne de communication visant à persuader les entreprises dont la marque de commerce est en anglais de la franciser. On pense ici, notamment, aux multinationales dont les succursales sont identifiées par la même marque qu'elles se trouvent en Chine, au Brésil, en France ou au Québec.

Jusqu'à maintenant, le gouvernement québécois considérait ces marques de commerce comme hors de la portée de la loi 101 parce que protégées par le droit international. Devant ce constat d'impuissance, la commission Larose sur l'avenir de la langue française avait recommandé à Québec de faire pression pour que les conventions sur les marques de commerce soient modifiées. Le Forum mondial de la langue française, qui aura lieu à Québec l'été prochain, fournira une belle occasion d'amorcer une démarche en ce sens.

Entre-temps, l'OQLF diffuse ce qui nous semble être une nouvelle interprétation du règlement sur l'affichage. Selon l'organisme, si un commerce peut s'identifier avec une marque de commerce en anglais, il doit impérativement accompagner celle-ci d'un descriptif en français. Par exemple, une entreprise dont la marque de commerce enregistrée est Daily Living pourra l'employer dans son affichage en autant qu'elle y joigne un générique en français (Ameublement Daily Living).

L'Office réussira-t-il à convaincre les chaînes qui, jusqu'ici, se sont montrées récalcitrantes? Ce sera possible seulement si cette campagne est appuyée au plus haut niveau par les dirigeants politiques et par les milieux d'affaires.

En cas d'échec, faudra-t-il passer à une étape coercitive, comme le réclame le Parti québécois? Cela ne saurait être qu'un ultime recours. Il faut s'assurer que Québec est en terrain juridique solide. Surtout, on devra se demander si en imposant des amendes de quelques milliers de dollars à ces géants commerciaux, on arrivera à autre chose qu'à provoquer chez eux agacement et incompréhension.