Montréal compte dans sa portion ouest un golf à l'avenir incertain, le Club Meadowbrook. Vaste terrain dont la superficie rivalise avec celle du parc Maisonneuve, il attire les convoitises: les riverains rêvent à un espace vert protégé; le privé envisage un imposant développement résidentiel.

Et que décide l'administration Tremblay? De ne rien faire, de ne pas toucher à cet espace qui n'a de vert que son gazon, de préserver le golf au bénéfice de ses... 180 membres!

Que la Ville n'ait pas les sous pour acquérir le terrain passe encore. D'autant plus que l'arrondissement de Lachine a déjà fait savoir qu'elle exigera une compensation fiscale si elle doit faire une croix sur toutes recettes foncières dans ce secteur.

Montréal aurait donc à verser des dizaines de millions de dollars... pour un terrain, disons-le, qui ne le vaut pas. Meadowbrook n'est tout simplement pas l'éden verdoyant au riche potentiel écologique dépeint par les partisans de la protection. Il s'agit plutôt d'un site à la biodiversité affaiblie, traversé par une rivière canalisée, dont les rares arbres matures menacent de tomber d'ici une dizaine d'années.

En revanche, il est tout à fait incompréhensible que la Ville lève le nez sur le projet immobilier du Groupe Pacifique, dont le potentiel est incontestable. Incontestable quant à la revitalisation urbaine et aux entrées fiscales. Mais incontestable, aussi, en terme... écologique.

Le projet Petite-Rivière, qui était au coeur d'une journée de réflexion hier à McGill, est en effet l'archétype de l'éco-quartier, sorte d'embryon de la ville réinventée. Faisant appel à une quarantaine de spécialistes parmi les plus respectés, le promoteur a déposé ce qui est de loin le plus abouti des projets de quartier vert au pays.

Le coordonnateur du projet, le professeur d'architecture de l'Université de Montréal Daniel Pearl, s'est en effet inspiré de communautés durables comme BedZED (Grande-Bretagne) et Bo01 (Suède) pour imaginer un quartier qui utilise le moins possible de ressources, qui récupère ce qu'il rejette, qui produit sa propre énergie et qui n'émet aucun gaz à effet de serre.

Se concentrant sur la moitié la plus à l'est du terrain de 57 hectares, l'architecte a pensé à un développement majoritairement accessible au public, doté d'une gare, où le piéton est roi. Les 1600 unités résidentielles et les 4600 m2 d'espace commercial prennent moins du tiers du terrain, le reste serait consacré à des espaces publics, des espaces verts et des jardins communautaires.

Voilà une occasion qui ne se représentera pas de sitôt: un promoteur aux reins solides prêt à embarquer dans les rêves les plus fous des concepteurs les plus fous. Et l'administration, malgré toutes ses orientations vertes, ne montre aucun intérêt!

Face à tant de volonté, on se serait attendu à ce qu'elle écoute et pose ses propres conditions (la protection de la partie ouest du terrain?) plutôt que de regarder ailleurs les bras croisés.

Qu'en pensez-vous? Exprimez votre opinion