Tels des missiles Scud, les hausses de l'impôt foncier frappent un peu partout depuis cinq ans. Selon une compilation de La Presse dévoilée hier, plus de 98% des municipalités ont été touchées. Certaines de plein fouet.

Or ces frappes étaient prévisibles. Déjà, en 2003, le Conference Board sonnait l'alarme: «les municipalités québécoises souffriront sous peu d'une insuffisance de ressources qui grandira considérablement au cours des 20 prochaines années.»

Québec et les villes ont pris acte. Des changements ont été apportés, un pacte fiscal a été ratifié et un plan de renouvellement des infrastructures a été élaboré. Si bien que les municipalités ont profité de sommes bonifiées et d'une péréquation révisée.

Mais cela ne les a pas empêchées, parallèlement, d'augmenter leurs dépenses et par le fait même, les comptes de taxes. Au cours des cinq dernières années, 1042 des 1062 municipalités ont haussé le fardeau fiscal de leurs citoyens. La moitié d'entre elles ont augmenté les taxes trois fois plus vite que l'inflation.

Comment les villes ont-elles ainsi pris l'apparence de trous sans fonds? Par une combinaison de facteurs auxquels ni Québec ni les maires n'ont voulu s'attaquer.

D'abord, les municipalités ont vu leurs responsabilités croître au cours des années, mais pas leurs revenus. Il y a 25 ans, elles n'avaient à fournir que quelques services à la propriété: eau, ordures et égouts. Mais au fil du temps, elles ont dû faire face à un important délestage de responsabilités de la part de l'État, elles ont ajouté le développement économique à la liste et elles ont assisté à une explosion des services à la personne: logement social, transport collectif, culture, aide aux familles et aux aînés, etc.

Et pourtant, les villes sont tout aussi dépendantes du champ foncier aujourd'hui qu'à l'époque: environ 75% de leurs revenus proviennent de la taxe foncière (en incluant compensations de taxes et tarification), malgré les promesses répétées du gouvernement de revoir la situation.

Cela dit, les villes ont aussi leur part de blâme. Plusieurs ont refusé d'assainir leurs finances autant que la situation le commandait, elles ont souvent capitulé devant les syndicats et elles ont longtemps négligé l'entretien de leurs infrastructures.

En outre, nombreuses sont celles qui refusent d'utiliser la tarification pour alléger le foncier, de crainte de déplaire à leurs citoyens. Rare exception, Montréal, qui a osé tarifer l'eau et la voirie et qui a imposé un droit sur l'immatriculation... alors que la soixantaine de villes entourant l'île ont refusé net de l'appliquer.

Donc oui, le gouvernement devra diversifier les sources de revenus des villes. Oui, il devra les aider à affronter les déficits des régimes de retraite. Mais ces dernières devront aussi faire leur part en se serrant davantage la ceinture et en ayant recours à la tarification, à la fois pour transférer les coûts aux utilisateurs et pour alléger le foncier.

Les frappes ne s'arrêteront pas demain matin, mais au moins, elles seront plus ciblées.

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