Les agences gouvernementales sont bien commodes: elles permettent au gouvernement d'avoir la main haute sur ce qui se passe sur le terrain... puis de s'en dissocier lorsque les choses tournent mal.

En témoigne le Train de l'Est, ce lien ferroviaire devant relier Mascouche à Montréal. Jean Charest était tout sourire, en 2006, lorsqu'il a annoncé le projet. À 300 M$, c'était un formidable projet gouvernemental!

Puis la facture est passée à 435 M$ en 2009, 478 M$ l'année suivante, 665 M$, pour finalement atteindre 715 M$. À ce prix-là, c'est vite devenu un projet de l'Agence métropolitaine de transport...

Il y a donc eu dérive, et Québec s'en lave les mains. Même si le premier ministre a coupé le ruban. Même si le maître d'oeuvre relève directement du ministre des Transports. Même si le gouvernement est imputable de chaque dollar versé dans ce chantier.

L'AMT a ses torts, entendons-nous. Elle a voulu aller trop vite, elle a improvisé, elle a négligé les réserves foncières, elle a été complaisante à l'endroit des villes. Bref, elle a bâclé le projet de A à Z. Mais c'est néanmoins le gouvernement, initialement, qui a mandaté l'AMT malgré le peu d'informations crédibles qu'il détenait sur le projet à l'époque. En ce sens, le problème réside plus dans l'évaluation initiale des coûts... que dans la hausse de coûts comme telle. Toute sous-évaluation est, par définition, condamnée à être réévaluée, comme nous l'ont d'ailleurs démontré à peu près tous les grands projets de l'histoire récente du Québec.

Rappelons-nous la conclusion du vérificateur général, en 2007. Après avoir étudié en détail neuf projets d'envergure, il s'était aperçu que le coût réel dépassait le prix annoncé... systématiquement.

C'était le cas pour le métro de Laval (annoncé au coût de 179 M$...), le CHUM et tous les autres projets qui ont été minés par une mauvaise définition des besoins, une analyse insuffisante des risques, des estimations incomplètes... et un gouvernement qui se défile par la suite.

Vrai, Québec a une nouvelle politique sur la gouvernance des grands projets, en vigueur depuis 2008 (donc ultérieure au Train de l'Est). Cela devrait insuffler plus de rigueur à la réalisation, au suivi, et à l'échéancier des chantiers.

Par contre, ce qui est moins clair, c'est à quel point cette politique modifiera les façons de faire en amont des annonces électorales, lors de la collecte des données préliminaires et de l'élaboration des avant-projets. C'est là qu'on retrouve une bonne partie du problème.

Pour éviter que les hausses de coûts soient coutume, Québec aurait intérêt à prendre exemple sur les simples propriétaires de maisons. Lorsqu'ils songent à faire des travaux, ils ne se contentent pas d'une évaluation teintée de pensée magique. Ils demandent combien cela coûtera... et combien cela pourrait coûter.

Le gouvernement pourrait ainsi inclure dans toute annonce future le prix plancher ET le prix plafond du projet, afin de prendre une décision en connaissance de cause. Et de donner, enfin, l'heure juste aux contribuables.

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