Opposées à l'implantation de l'anglais intensif en 6e année, les fédérations d'enseignants ont quitté la table de travail, cette semaine. Main dans la main avec le PQ, elles ont demandé le retrait de cette mesure qu'elles jugent «improvisée» et «unilatérale».

Pourtant, s'il y un programme scolaire qui a été étudié au Québec, s'il y en a un qui a été abondamment testé sur le terrain et qui a fait ses preuves, c'est bien l'apprentissage intensif d'une langue seconde à la fin du primaire!

Certes, l'annonce du premier ministre Charest semblait sortir d'un chapeau lors de son discours inaugural, l'an dernier. Mais c'était oublier le rapport de la commission Larose dix ans plus tôt, les nombreuses études menées à ce sujet depuis les années 70 ainsi que les succès éclatants du programme d'anglais intensif au Lac-Saint-Jean, où il s'applique à la quasi-totalité des élèves de 6e année.

Il faut en effet se rappeler les témoignages entendus lors des États généraux sur la langue française, en 2001. À tour de rôle, les spécialistes affirmaient alors que l'enseignement d'une langue à petite dose est totalement inefficace. Ils ajoutaient que la voie à suivre était plutôt l'apprentissage «intensif» dans un court laps de temps.

D'où la conclusion de la Commission, qui recommandait «un enseignement concentré» dans «un environnement culturel anglais» ainsi qu'«un nombre d'heures d'enseignement au moins deux fois supérieures à ce qui existe».

On s'appuyait ainsi sur les divers témoignages, mais surtout sur les nombreuses recherches, études et analyses produites sur la question, ici même au Québec. Car ce n'est pas d'hier qu'on applique le modèle souhaité par le gouvernement Charest. Les premières classes consacrant cinq mois à l'anglais et cinq mois aux autres matières ont vu le jour en 1976, puis elles se sont multipliées, si bien qu'aujourd'hui au Québec, une classe de 6e sur dix offre un programme intensif.

Mieux, la totalité des écoles de la commission scolaire du Lac-Saint-Jean en fait autant. Appliquée dès 1993 dans quatre écoles d'Alma, la mesure a fait tache d'huile sous la pression des parents qui voulaient tous que leur enfant ait accès à une telle immersion.

Aujourd'hui, 93% des élèves de 6e année profitent de ce programme... sans traces d'hécatombe. De 2007 à 2010, le rendement en français n'a pas bougé (79%), tandis que le taux de réussite en anglais a bondi (de 65 à 94%) de même que les notes en mathématiques (61 à 74%).

Voilà matière à réflexion. D'autant que ce vaste projet pilote corrobore les nombreuses études sur la question, qui arrivent aux trois mêmes conclusions: l'immersion est beaucoup plus efficace que le saupoudrage; elle consolide la seconde langue sans effet sur la première; et elle ne nuit pas au rendement scolaire (certaines soutiennent même qu'elle l'améliore).

Comme le dit Égide Royer, grand spécialiste des élèves à risque, «il n'existe pas de contre-indication au programme intensif, pas même pour les élèves en difficulté ou atteints de troubles du comportement».

Y a-t-il, pour les enseignants, des pratiques à revoir et des habitudes à changer? Y aura-t-il des défis liés au recrutement des professeurs d'anglais, au recours aux spécialistes et au maillage des commissions scolaires anglophones et francophones? Certainement. Et c'est pourquoi l'apport des fédérations est précieux.

Les syndicats d'enseignement auraient donc beaucoup plus intérêt à participer à la discussion qu'à faire obstacle à une mesure pertinente, souhaitée par une majorité de parents.

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