Ne nous méprenons pas. Si Vladimir Poutine a donné l’ordre de bombarder de grandes villes ukrainiennes, au mépris des vies humaines, ça ne signifie pas qu’il est en train de gagner la guerre.

Bien au contraire.

Et s’il avait le mois dernier annoncé en grande pompe l’annexion de quatre régions de l’Ukraine, ce n’était pas non plus la preuve d’un triomphe éclatant.

Absolument pas.

Sa guerre avait à l’origine été présentée comme une opération rapide pour prendre le contrôle de l’Ukraine. Elle s’est transformée en intervention coûteuse dont on ne voit pas la fin.

Non seulement l’Ukraine résiste, mais avec sa récente contre-offensive, elle a de nouveau humilié Vladimir Poutine et son armée.

L’image de Poutine avait été savamment cultivée au cours des dernières décennies. Il était perçu, avant d’envahir l’Ukraine, comme un grand leader doublé d’un habile stratège.

Le vernis a craqué. On assiste maintenant en direct au rapetissement du président russe. Et au ratatinement de ses rêves de grandeur.

L’escalade actuelle ne lui permettra pas d’annihiler son rival ukrainien.

C’est plutôt le symbole de son impuissance contre un rival plus petit, plus faible, mais nettement plus déterminé et entouré de précieux alliés.

C’est en fait une réaction aux nombreuses critiques de la part des partisans russes de la ligne dure sur l’Ukraine.

Et c’est un acte vengeur, assurément.

La puissante explosion sur le pont qui relie la Crimée à la Russie a représenté une gifle de taille pour le président, déjà irrité par les avancées des forces ukrainiennes au sein de zones revendiquées par Moscou.

Le voici donc en train d’ordonner des frappes qui détruisent des infrastructures critiques et tuent des civils, et ce, sur l’ensemble du territoire ukrainien. Une tactique barbare qui a poussé le président français Emmanuel Macron à parler d’un changement « de la nature de cette guerre ».

Mais si changement il y a, il s’inscrit dans la continuité. Car ces nouvelles frappes nous rappellent une fois de plus la vraie nature de Vladimir Poutine, la vraie nature de son régime et la vraie nature de ce conflit.

L’escalade russe témoigne aussi des succès de la stratégie occidentale. C’est par prudence que nos dirigeants ont décidé de soutenir l’Ukraine sans intervenir militairement. Ils voulaient éviter de trop provoquer l’ours russe.

On constate aujourd’hui que ce pari était le bon. Jusqu’à preuve du contraire, à tout le moins.

Car la situation actuelle n’est pas garante de l’avenir. Vladimir Poutine était surestimé, mais il ne faudrait surtout pas se mettre, maintenant, à le sous-estimer.

La Russie dispose toujours de vastes ressources. Aussi impopulaire soit-elle, la décision de mobiliser 300 000 réservistes ne sera pas sans conséquences sur le terrain. Et même si l’équipement militaire de Moscou n’est pas inépuisable, les missiles continuent de pleuvoir sur l’Ukraine.

C’est pourquoi le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, a appelé ses alliés en début de semaine à « renforcer l’effort général pour aider financièrement à la création d’un bouclier aérien pour l’Ukraine ».

Sa demande a été entendue. L’Allemagne et les États-Unis ont déjà décidé de renforcer ce bouclier aérien. C’est essentiel. L’Ukraine est encore trop vulnérable et les vies de nombreux civils sont en jeu.

Le Canada, pour sa part, a fait connaître mercredi les détails d’une nouvelle aide militaire de quelque 47 millions de dollars, incluant des obus, des caméras spécialisées pour drones et des articles d’hiver pour les troupes.

Les besoins sont grands et ne vont pas aller en diminuant. Il est crucial pour le Canada et ses alliés d’accroître encore davantage leur soutien.

L’Ukraine aura aussi, forcément, besoin d’aide financière additionnelle. Notamment pour réparer les infrastructures énergétiques civiles détruites par les frappes russes.

La solidarité des pays occidentaux sera mise à l’épreuve au cours des prochains mois. Particulièrement en Europe, alors qu’on se prépare à un hiver sans gaz russe.

Ne nous méprenons pas. Vladimir Poutine est affaibli, mais ni ses ambitions impériales ni son désir de vengeance ne sont assouvis. Il voudra certainement pouvoir bomber le torse à nouveau. Ne lui donnons pas cette chance.

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