Ciel couvert. Risque d’orage violent. C’est un sale temps pour la démocratie.

Peu importe le résultat final des élections de mi-mandat, la voie est grande ouverte pour le retour de Donald Trump, même s’il a miné comme pas un les institutions de son pays.

Inutile de se bercer d’illusions. Le Canada n’échappe pas à la vague. Nous sommes dans le même bateau que les Américains. Des deux côtés de la frontière, nos démocraties prennent l’eau.

Les parallèles font peur.

Voyez seulement comment nos processus électoraux sont victimes d’ingérence de la part de dictateurs étrangers.

Au Canada, on apprenait cette semaine que la Chine a financé en cachette la candidature d’au moins 11 candidats aux élections fédérales de 2019.

L’heure est grave, il s’agit d’une question de sécurité nationale, de l’aveu même de nos services de contre-espionnage. Cessons d’être naïfs.

Les dictateurs ne sont pas nos amis. En nous manipulant sur les réseaux sociaux, ils cherchent à nous déstabiliser pour tirer les ficelles de la planète à leur avantage.

On l’a vu lors des élections de 2016 qui ont porté Donald Trump au pouvoir.

Ceux qui refusent encore d’admettre que la Russie l’a aidé à entrer à la Maison-Blanche n’ont qu’à écouter Evguéni Prigojine, un homme d’affaires proche de Vladimir Poutine. Cette semaine, il a candidement admis avoir interféré dans les élections américaines et vouloir continuer de le faire « avec précaution, précision, de façon chirurgicale ».

Après, comment s’étonner que Trump ait qualifié de coup de génie l’invasion de l’Ukraine ?

Puisque la Chambre des représentants devrait tomber dans le camp de Donald Trump, on peut sérieusement craindre que les Américains réduisent leur soutien à l’Ukraine, qui se bat par procuration pour toutes les démocraties. Pas seulement la sienne.

Mais les fondements de notre démocratie sont aussi ébranlés de l’intérieur, au Canada comme aux États-Unis.

Le nouveau chef du Parti conservateur, Pierre Poilievre, a repris des pages entières du mode d’emploi de Donald Trump.

Exactement comme Trump qui avait démonisé la Réserve fédérale américaine, il n’a pas ménagé ses attaques contre la Banque du Canada, qu’il accuse – tout comme Justin Trudeau – d’être responsable de l’inflation.

PHOTO ADRIAN WYLD, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Pierre Poilievre, chef du Parti conservateur du Canada

À entendre Pierre Poilievre, l’inflation serait un problème purement canadien, alors que c’est complètement faux. Ce n’est pas en détruisant la crédibilité de notre banque centrale qu’on réglera le problème, bien au contraire.

Mais en bon populiste, M. Poilievre aime trouver des boucs émissaires faciles. Comme il aime aussi lever le nez sur les médias, une autre recette célèbre de Donald Trump qui empoisonne la démocratie.

Le plus inquiétant, c’est de voir les faits prendre complètement le bord.

PHOTO JASON FRANSON, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Danielle Smith, première ministre de l’Alberta

Avec l’arrivée de Danielle Smith comme première ministre de l’Alberta, les complotistes ont carrément pris le pouvoir. La science ? Pas trop son truc. Elle est plutôt du genre à relayer de la propagande russe et à monter au front contre le Forum économique de Davos, associé à une théorie farfelue voulant qu’un groupe de riches utilise la pandémie pour prendre le contrôle de la planète. Rien de moins !

Il est déplorable de voir qu’une personne qui méprise ainsi les faits soit au pouvoir, ici, au Canada. Au moins, elle n’a pas été élue, mais plutôt nommée par son parti.

Mais aux États-Unis, les électeurs ont bel et bien voté pour des adeptes du « grand mensonge » voulant que Donald Trump ait remporté l’élection de 2020, même si cela est totalement faux.

Or, ces élus seront les gardiens des résultats de la prochaine présidentielle, en 2024. Ils risquent de bloquer la certification des résultats, si Donald Trump n’est pas élu.

Cela donne froid dans le dos.

Plus que jamais, on a la preuve que la démocratie, qu’on croyait acquise, est plus fragile qu’on le pense. L’Histoire n’est pas finie, contrairement à ce qu’avait dit le chercheur Francis Fukuyama après la chute du mur de Berlin, en imaginant que la démocratie libérale n’aurait désormais plus de rivale.

Si on ne veut pas que le prochain chapitre de l’histoire soit trop sombre, il faut prendre très au sérieux les attaques contre la démocratie, au Canada comme aux États-Unis.

Qu'en pensez-vous? Exprimez votre opinion