Les élus montréalais ont enfin décidé de s'attaquer à un problème trop longtemps ignoré: ces immeubles historiques négligés par leur propriétaire, de façon tout à fait volontaire, dans le seul but de les raser et de pouvoir ainsi reconstruire, plus gros et plus haut.

Les élus montréalais ont enfin décidé de s'attaquer à un problème trop longtemps ignoré: ces immeubles historiques négligés par leur propriétaire, de façon tout à fait volontaire, dans le seul but de les raser et de pouvoir ainsi reconstruire, plus gros et plus haut.

La Maison Redpath en est un exemple patent. Sauvé en grande partie du pic des démolisseurs en 1986, cet édifice est depuis abandonné par leurs propriétaires, qui n'attendent qu'un joyeux alignement des planètes pour jeter ce qu'il en reste sur le sol.

Ces derniers croyaient d'ailleurs le moment venu, il y a quelques jours, alors que leur demande de démolition franchissait sans encombre la première lecture, au conseil d'arrondissement de Ville-Marie. Mais les pressions de Projet Montréal et des groupes de défense du patrimoine ont permis au maire Tremblay de voir la lumière et de mettre fin, la semaine dernière, à cette aberration.

Aberration, en effet, car il s'agissait ni plus ni moins que d'une récompense à la négligence: en refusant ainsi d'entretenir son avoir, tout historique soit-il, le propriétaire croyait bien avoir les autorités - et les permis - à l'usure.

Erreur. L'arrondissement a fini par s'y opposer, envoyant - enfin ! - un message clair à tous ceux qui sont tentés de négliger pour encaisser.

Parallèlement, dans le Plateau voisin, l'administration Ferrandez lançait un message similaire en ciblant un autre édifice historique négligé, sis au coin nord-ouest du boulevard Saint-Laurent et de l'avenue Des Pins.

Décidant d'agir avant que la dégradation ne soit irréparable, l'arrondissement a traîné le propriétaire devant la Cour supérieure. Cette dernière a émis une injonction, jeudi dernier, qui oblige l'intimé à entretenir et restaurer son édifice d'ici 300 jours. À défaut de quoi, il sera accusé d'outrage au tribunal et la Ville pourra procéder elle-même aux travaux, puis lui refiler la facture...

C'est la première fois qu'un arrondissement se sert du tout récent règlement sur l'entretien des bâtiments pour contraindre ainsi un propriétaire peu scrupuleux de s'occuper de son avoir. Et c'est tant mieux. Car cette négligence ne nuit pas qu'au bâtiment abandonné aux quatre vents, elle diminue les revenus potentiels pour la Ville et fait pression à la baisse sur la valeur foncière environnante.

Ce geste de l'administration Ferrandez mérite donc d'être répété dans les autres arrondissements centraux. S'il est difficile de recourir au même règlement pour des bâtiments dont il n'est plus question d'entretien, mais bien de reconstruction, comme les maisons Redpath et LaFontaine, il existe encore sur l'île bon nombre de ces bâtiments qui manquent d'amour...

C'est en agissant de la sorte, en bloquant les demandes de démolition, en exigeant l'entretien et la restauration du patrimoine qu'on mettra fin à cette idée, entretenue depuis trop longtemps, que la valeur d'un bâtiment historique ne se révèle qu'une fois celui-ci rasé.

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