Le BIXI est un énorme succès à Montréal, les abonnés sont en hausse, les déplacements aussi et les activités sont sur le point de s'autofinancer. Et pourtant, la Ville s'apprête à faire un geste qui pourrait l'obliger à mettre ses vélos au rancart. Pour de bon.

À la demande de Québec, l'administration Tremblay doit en effet envisager de céder le volet international de BIXI à des intérêts privés, et ce, pour se conformer à la loi. Les municipalités, stipule cette dernière, n'ont pas le droit d'exercer des activités commerciales à caractère lucratif.

Or en appliquant ainsi la loi à la lettre, le gouvernement force la Ville à commettre une erreur monumentale dont les Montréalais ne saisissent pas toutes les répercussions.

Le volet international de BIXI, qui a permis à la Ville de vendre des vélos à travers le monde, est une vache à lait. L'exportation, cette année, permettra à BIXI de toucher 80 M$... sur un chiffre d'affaires de 90 M!

Ce n'est pas sorcier: sans activités internationales pour financer les activités locales, ces dernières risquent d'être déficitaires. Et le cas échéant, il suffira d'attendre la fin de la durée de vie utile des vélos, dans trois ans, pour que les liquidités s'assèchent... et que BIXI Montréal soit voué à disparaître.

Maintenant que le redressement administratif de BIXI est chose faite, maintenant que la Ville s'est portée au secours du service en offrant un prêt (37 M$) et une garantie de prêt (71 M$), la question se pose: souhaitons-nous que ces vélos en libre-service demeurent dans le paysage montréalais?

Il est regrettable, dans pareille situation, de voir la rigidité avec laquelle le ministre des Affaires municipales gère le dossier, une attitude qui tranche d'ailleurs avec la souplesse dont il a su faire preuve avec l'amphithéâtre de Québec. Au maire Labeaume qui exigeait une dérogation pour s'entendre avec le privé, le ministre a dit oui et a changé la loi. Mais au maire Tremblay qui demandait une dérogation pour maintenir un réseau de transport collectif sur deux roues, il a répondu que la loi, c'est la loi...

Pourtant, au-delà de la pérennité de BIXI, il est question de la survie d'une chaîne de services et d'approvisionnement dont dépendent 450 emplois. Il est question d'un concept imaginé par le Montréalais Michel Dallaire, construit par la québécoise De Vinci, entretenu par une entreprise d'économie sociale de chez nous.

Il est question, aussi, d'un phénomène international dont la province tire profit. Les BIXI qui roulent sur trois continents sont fabriqués au Saguenay. L'expertise nécessaire pour leur déploiement vient du Québec. Et le service d'appel qui dessert sept villes nord-américaines est à Montréal.

Au mieux, donc, on permet à la Ville de continuer à s'en occuper, au pire on s'assure que des entreprises ou des institutions de financement d'ici en prennent possession et que tout soit mis en oeuvre pour assurer localement la survie du réseau.

Le BIXI est un fleuron, n'en faisons pas un fiasco.

Qu'en pensez-vous? Exprimez votre opinion