Des entrepreneurs technologiques qui tentent de vendre leur salade à un jury de grands-mères. Des conférenciers qui arrivent directement de San Francisco en jet privé. Plus 4000 jeunes vêtus de leur éternel t-shirt qui rêvent de devenir le prochain Mark Zuckerberg, cofondateur de Facebook.

La septième édition du Startupfest, la grand-messe des entreprises en démarrage, s'ébranle aujourd'hui à Montréal. L'engouement sans cesse croissant que suscite l'événement témoigne d'un virage encourageant : il est maintenant à la mode, au Québec, d'être un entrepreneur technologique.

Pour ceux qui croient à l'économie du savoir, ce dynamisme qui bouillonne à la base de l'écosystème est une excellente nouvelle.

Mais tout en saluant la décision de ces milliers d'entrepreneurs qui prennent le risque de se lancer en affaires, on ne peut s'empêcher de leur envoyer un message. Un message qu'on pourrait résumer ainsi : cessez de vouloir pondre une application mobile qui deviendra la prochaine saveur du mois sur l'App Store et voyez grand. Au lieu de viser un succès rapide, bâtissez des entreprises durables qui apporteront une vraie contribution à long terme.

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Les entrepreneurs technologiques ont aujourd'hui leurs conférenciers-vedettes, leurs blogues, leur style. Il n'y a rien de mal à cela. Mais cette culture qui nous vient de la Silicon Valley ne doit pas nous faire oublier l'essentiel : lancer une entreprise devrait servir à répondre à un besoin réel. Pas à épouser un mode de vie, aussi dans le vent soit-il.

Nous n'avons rien contre l'idée d'utiliser nos téléphones mobiles pour écraser des friandises (Candy Crush) ou lancer des oiseaux avec des lance-pierres sur des cochons (Angry Birds). Mais pendant ce temps, nos sociétés sont aux prises avec des enjeux comme le vieillissement de la population, l'adaptation aux changements climatiques, les virus informatiques qui dérèglent nos infrastructures. Il y a là de beaux défis pour les entrepreneurs et programmeurs créatifs qui veulent changer les choses.

Ceux qui chercheraient des modèles en ont un tout désigné. En Elon Musk, la Silicon Valley a sans doute trouvé l'entrepreneur le plus idéaliste et le plus ambitieux de toute son histoire.

Avec Tesla, il veut sauver l'environnement, quitte à bouleverser l'industrie automobile mondiale. Quant à SpaceX, n'importe qui aurait crié «mission accomplie» en parvenant à fabriquer des fusées réutilisables capables de ravitailler la Station spatiale internationale. Mais ce n'est qu'une première étape pour Elon Musk, qui vise à coloniser Mars pour faire de l'être humain une «espèce multiplanète» - rien de moins.

Tout le monde n'est évidemment pas Elon Musk - heureusement d'ailleurs, car l'homme a ses défauts. Mais son travail acharné, son audace et l'ampleur de ses rêves doivent servir d'inspiration aux entrepreneurs.

Il est bien sûr facile de demander aux autres de changer le monde. Il faut aussi reconnaître que le Startupfest a permis de braquer les projecteurs sur d'intéressantes entreprises québécoises au fil des ans. On pense à Jintronix, qui utilise le capteur Kinect de la console Xbox pour faire de la rééducation auprès des victimes d'accidents cardiovasculaires. Ou à Hexa Foods, qui fabrique des aliments pour animaux domestiques dits écoresponsables dont les protéines proviennent notamment d'insectes.

Mais davantage d'entrepreneurs doivent les imiter. Ceux qui convergent ces jours-ci vers le Vieux-Port de Montréal doivent aspirer à casser la baraque et à changer le monde. Celui-ci, après tout, en a bien besoin.

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