Deux attentats-suicide ont frappé Moscou hier matin à 45 minutes d'intervalle. À l'heure où nous écrivons ces lignes, ces attaques coordonnées n'ont pas clairement été revendiquées. La prudence s'impose donc. Toutefois, ces attentats rappellent douloureusement ceux qui ont frappé Moscou et plusieurs villes du Caucase du Nord entre 1999 et 2004: minutieusement préparés, ils sont apparemment le fait de femmes, décrites comme caucasiennes, qui se sont fait exploser dans deux stations d'une même ligne de métro à une heure de grande affluence. Le dernier bilan fait état de 38 morts et de plus de 65 blessés.

Deux attentats-suicide ont frappé Moscou hier matin à 45 minutes d'intervalle. À l'heure où nous écrivons ces lignes, ces attaques coordonnées n'ont pas clairement été revendiquées. La prudence s'impose donc. Toutefois, ces attentats rappellent douloureusement ceux qui ont frappé Moscou et plusieurs villes du Caucase du Nord entre 1999 et 2004: minutieusement préparés, ils sont apparemment le fait de femmes, décrites comme caucasiennes, qui se sont fait exploser dans deux stations d'une même ligne de métro à une heure de grande affluence. Le dernier bilan fait état de 38 morts et de plus de 65 blessés.

Plusieurs responsables russes font également savoir que ces kamikazes n'auraient pas agi seules: les caméras de vidéosurveillance les montrent en effet accompagnées de deux femmes jusqu'à l'entrée des bouches de métro d'où elles ont embarqué à bord des rames touchées.

Sitôt ces événements survenus, les dirigeants russes ont relié ces deux attentats à la situation dans le Caucase du Nord. Cette région du sud de la Russie connaît depuis le début de l'année 2009 une explosion de violences. La Tchétchénie reste un foyer majeur d'instabilité malgré les déclarations rassurantes et souvent triomphalistes du premier ministre russe, Vladimir Poutine, et du président tchétchène prorusse, Ramzan Kadyrov. Mais depuis 2004, les violences ont gagné deux républiques voisines, l'Ingouchie et le Daghestan. Les attaques de guérilla contre les représentants des forces de sécurité russes sont quasi quotidiennes; les assassinats politiques se multiplient et les attentats-suicide ont fait leur retour dans la région à l'été dernier.

Ces violences sont le fait de groupes divers aux motivations variées. Ceux se revendiquant d'un islam radical se montrent toutefois particulièrement actifs. Ils ont pour la plupart fait allégeance à un certain Dokku Umarov, chef de l'insurrection tchétchène. Ce dernier a proclamé en 2007 un califat au Nord Caucase et s'est autodésigné «émir du Caucase». Il a parallèlement ouvert un Front caucasien, espérant rallier plusieurs groupes contestataires qui ne partagent pas toujours des objectifs communs, mais qui défendent une même vision radicale de l'islam. Cette annonce permettait à l'époque à la résistance tchétchène d'exister malgré son affaiblissement incontestable. Force est de constater que les insurgés tchétchènes sont parvenus depuis à se réorganiser et à fédérer sur une base plus ou moins solide d'autres groupes nés dans les régions voisines de la Tchétchénie.

Peu après avoir revendiqué l'attentat qui, en novembre 2009, a frappé le train qui relie Moscou–Saint-Pétersbourg, Dokku Umarov a annoncé que des femmes kamikazes sèmeraient la terreur à Moscou. Si la piste caucasienne se confirme, les attentats-suicide menés contre le métro moscovite en ce lundi tragique pourraient signaler une intensification du conflit au Nord Caucase. La situation que d'aucuns qualifiaient dès 2002 «d'explosive» deviendrait alors difficilement tenable pour Moscou.

Les solutions mises en oeuvre jusque-là semblent peu efficaces. Le président russe Dmitri Medvedev, qui reconnaissait en janvier 2010 les difficultés dans la région, a créé une nouvelle subdivision administrative englobant les républiques du Nord Caucase. L'objectif affiché est de tenter d'améliorer les conditions socio-économiques, de combattre la corruption devenue endémique et de freiner l'islamisation, trois facteurs identifiés comme les principales causes des violences qui se multiplient.

Mais à aucun moment les dirigeants russes ne semblent vouloir reconnaître que le problème est avant tout politique: les pratiques autoritaires des dirigeants locaux alimentent une crise de légitimité qui a atteint depuis le début de l'année 2009 son paroxysme.

Dans ce contexte, l'islam semble être devenu une force de contestation sociale de première importance et un cri de ralliement sur lequel capitalisent des groupes contestataires, qui, bien que minoritaires, semblent gagner en visibilité.