Nous vous présentons ici des extraits du mémoire que le président et éditeur de La Presse et président de Gesca a livré, lundi, devant Mme Christine St-Pierre, ministre de la Culture, des Communications et de la Condition féminine, à l'occasion de sa consultation publique intitulée Pour une information au service de l'intérêt public.

En février 2001, témoignant devant la commission parlementaire de la culture, Gesca avait pris plusieurs engagements dans le cadre de l'acquisition des quotidiens Le Soleil à Québec, Le Droit dans l'Outaouais et Le Quotidien au Saguenay. Ces engagements comprenaient notamment de:

> reconnaître et favoriser l'indépendance des directions de l'information et des salles de rédaction;

> investir dans des contenus de qualité;

> et fournir au Conseil de presse du Québec les moyens de mieux remplir sa mission.

Dix ans plus tard, nous sommes fiers de pouvoir dire que malgré les crises financières et les mouvements de convergence, nous avons tenu chacun de ces engagements.

Des quotidiens de qualité

Ainsi, chaque quotidien de Gesca a conservé sa personnalité propre, sa salle de rédaction indépendante et a réussi à améliorer sensiblement ses contenus grâce à l'apport tangible des ressources journalistiques et financières de Gesca.

D'ailleurs, dans chacun de leurs marchés respectifs, nos salles de nouvelles sont les plus importantes en termes d'effectifs, ce qui fait de chacun de ces journaux un leader régional. Qui plus est, leur présence dans les régions qu'ils desservent participe significativement à rehausser la qualité de l'information locale, régionale et nationale.

Maintenir une saine distance entre l'industrie des médias et l'État

Dans la foulée du rapport Payette contenant les conclusions des travaux du Groupe de travail sur le journalisme et l'avenir de l'information au Québec, le ministère de la Culture, des Communications et de la Condition féminine invitait les médias à commenter l'éventualité de la mise en place d'un nouveau modèle de régulation des médias québécois. Ce nouveau modèle s'appuierait notamment sur une loi qui créerait un nouveau statut de journaliste professionnel.

À notre avis, le gouvernement fait fausse route, car nous estimons que les solutions aux divers défis rencontrés ces dernières années dans la sphère médiatique ne doivent pas passer par une intervention législative. Au contraire, le métier de journaliste doit être le plus possible affranchi de toute ingérence du pouvoir législatif. Cette saine distance entre les médias et l'État nous apparaît d'ailleurs comme un gage nécessaire au maintien de la liberté de la presse dans une société démocratique.

Aujourd'hui encore, Gesca et La Presse continuent de souhaiter que cette distance demeure et ne peuvent souscrire au fait que les débats actuels deviennent un motif pour affecter, voire amoindrir, cette indépendance essentielle des médias. Même avec des promesses d'un projet de loi limité, les intentions de base peuvent facilement être franchies par de nouvelles attentes qui pourraient rendre encore plus envahissante l'intervention du législatif dans le monde médiatique.

Dans ce contexte, Gesca et La Presse n'entendent pas changer leur orientation et appuyer la création d'un nouvel organisme qui viendrait ajouter une nouvelle couche de contrôle déontologique aux pratiques journalistiques. Cette nouvelle structure ne viendrait qu'alourdir encore plus le travail des médias en se superposant aux clauses professionnelles incluses dans les conventions collectives, au code déontologique de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec et aux responsabilités définies par le Conseil de presse du Québec.

Nous avons d'ailleurs le plus grand respect pour le Conseil de presse du Québec, un organisme indépendant qui a pour mission de défendre le droit du public à l'information et de s'assurer que ses membres adhèrent aux valeurs éthiques et déontologiques de la profession journalistique. Depuis sa création au début des années 1970, La Presse a toujours soutenu avec vigueur l'existence de ce tribunal d'honneur et en a été un de ses principaux contributeurs financiers.

Nous sommes donc d'avis que face à certaines pratiques journalistiques comme celles qu'a récemment connues la Grande-Bretagne, il est préférable d'accroître le rôle et les pouvoirs des organismes de surveillance indépendants existants comme le Conseil de presse du Québec plutôt que de légiférer sur la question.