Le coming-out public de David Testo, l'ancien joueur de l'Impact, est un geste porteur d'espoir pour toute la communauté LGBT. Le tabou de l'homosexualité dans le sport est le reflet d'un malaise social persistant face aux préjugés relatifs à l'orientation sexuelle.
Au cours des dernières années, de nombreuses campagnes ont dénoncé l'intimidation associée à l'orientation sexuelle. Ce combat est-il terminé pour autant? Certainement pas.
Vous avez 16 ans, vous êtes à l'école secondaire dans un programme sports-études, dans un club d'échecs ou dans tout autre programme de votre choix. Vous évoluez dans la «jungle» de l'école secondaire et êtes bien heureux de ne pas être victime d'intimidation, comme certains élèves. Vous avez des amis, vous passez beaucoup de temps avec eux et ils contribuent à la construction de votre estime personnelle et de votre identité. Pourtant, malgré cette relation de confiance et de camaraderie, vous sentez que vous êtes toujours un étranger à leurs yeux. Vous êtes homosexuel et vous-même utilisez des expressions à caractère homophobe (gay, fif, tapette) de façon courante pour caractériser de façon péjorative des objets, des situations ou des camarades.
Depuis quelques années, votre identité sexuelle est au coeur d'un questionnement profond, de remises en question et d'une solitude croissante. On vous dit que l'homosexualité est de plus en plus «acceptée», vous regardez des vedettes américaines vous répéter «It will get better» sur youtube, ou certains homosexuels arborer fièrement un chandail rose éclatant sur lequel il est inscrit «fckh8».
Vous aimeriez, comme vos camarades, avoir une vie affective et amoureuse sans en être honteux, sans vous cacher derrière un masque socialement construit. Malheureusement, l'image que vous avez de l'homosexualité correspond aux caricatures courantes que nous connaissons tous. Vous vous posez la question suivante: comment est-il possible que l'homosexualité soit de plus en plus acceptée, sans que je sois en mesure d'appliquer le même constat dans ma vie personnelle?
Il y a pourtant la parade de la fierté gai, les campagnes publicitaires et tant d'initiatives publiques qui n'arrivent pas à réduire en poussière l'omerta entourant la question... Il manque toujours quelque chose pour vous soutenir dans votre démarche. Un modèle, peut-être?
C'est un fait, on parle de plus en plus de l'homosexualité ouvertement et comme étant un fait social courant. On dénombre un bon nombre de campagnes publicitaires ou virales qui dénoncent l'intimidation à caractère homophobe, toujours présentes dans nos écoles. Plusieurs films, ceux de Xavier Dolan pour ne nommer qu'eux, intègrent l'homosexualité dans leurs histoires de façon extrêmement constructive.
Le festival Divers/cité, la fierté gai et les autres événements associés à cette question sont plus que jamais nécessaires. Il ne s'agit pas de contester leur apport, mais de se demander comment faire prendre à ce mouvement une nouvelle dimension. Pour optimiser une telle démarche, il s'agit avant tout de reconnaître l'impact de l'implication de certaines personnalités publiques sur la question. Il n'est pas question de voyeurisme, mais plus simplement de permettre la diffusion de modèles provenant d'une multitude de milieux. Qu'ils soient sportifs, artistiques ou politiques.
Ce faisant, on aborde la question sous un tout autre angle. Celui de l'orientation sexuelle assumée, ne définissant pas la personne dans sa totalité, mais faisant partie de son identité. On apprécie et on aime nos personnalités publiques pour leurs talents, leur implication et leurs accomplissements. L'orientation sexuelle n'influence en rien, en temps normal, cette appréciation. On doit impérativement utiliser ce vecteur pour permettre à de nombreuses personnes de réaliser que ce raisonnement leur est aussi applicable.
Le coming-out public de David Testo permet de consolider un état de fait qui, jusqu'à présent, restait ignoré: celui des préjugés associés à l'orientation sexuelle au sein des équipes sportives. Ces derniers constituent un reflet assez évocateur d'un malaise social persistant beaucoup plus vaste. À cela, on argumente que les personnalités publiques n'ont pas d'obligation de divulgation face à leur orientation sexuelle. On ne pourrait dire mieux, l'homosexualité relève de la sphère privée.
Cependant, une personnalité publique - par la tribune qui lui est accordée et par son influence incontestable sur la population - possède le pouvoir unique d'influencer l'opinion publique et les mouvements sociaux qui en émergent.
En jetant ces mots sur papier, je réalise que c'est par des gestes individuels comme ceux de David Testo qu'on pourra encourager un progrès réel face à cette question.
En jetant ces mots sur papier, je réalise aussi qu'il s'agit de mon propre coming-out.