En ce beau dimanche ensoleillé, je roule tranquillement sur l'autoroute avec ma fille en contemplant le paysage féerique d'hiver et tous ces arbres givrés qui reluisent sous le soleil... Je suis perdue dans mes pensées; depuis samedi matin, je suis branchée sur tous les médias, j'attends avec impatience le verdict dans le procès Shafia. Je suis partagée entre la hâte d'entendre le verdict du jury et la peur de son jugement. S'il fallait que la famille soit acquittée! Je ne veux même pas y penser, je frissonne d'horreur.

Et puis, voilà que la radio annonce qu'une décision a été rendue, mon sang se glace, j'ai peur... le journaliste prononce exactement les mots que je voulais entendre: coupable. Incapable de me retenir, j'ai crié ma joie et mon soulagement.

Le jury venait de rendre un verdict d'honneur, rien de moins. Quel grand jour pour la justice et pour le droit des femmes et des enfants! Aucune échappatoire, aucune excuse, aucun prétexte n'ont été crus, les gestes ont été planifiés, réfléchis, posés, et les coupables ont agi délibérément en enlevant la vie à quatre femmes. Maintenant, ils devront payer pour leur folie, leurs croyances et leurs actes dépravés.

Nous n'avons pas été en mesure comme société de protéger convenablement les victimes, nous avons été incapables de réagir à leur appel à l'aide, nous les avons laissées entre les mains de ces gourous et elles sont mortes, mortes pour avoir voulu vivre, vivre la vie que tout être humain a le droit de vivre dans ce beau pays qu'est le Canada.

En ce 29 janvier 2012, j'ai retrouvé confiance en la justice, je suis persuadée qu'un grand pas vient d'être franchi. Un message clair, direct et sévère vient d'être émis: des crimes d'honneur n'existent pas. Les mots honneur et crime ne vont pas ensemble.

J'espère de tout coeur que ce verdict juste et équitable servira d'exemple, j'espère qu'il sauvera la vie à des femmes et des enfants qui vivent sous l'emprise d'individus pervers et diaboliques qui se croyaient jusqu'à ce jour à l'abri de la justice, la vraie justice.

Rona, Zainab, Sahar et Geeti, reposez en paix. Nous avons la mince consolation que pour une fois justice a été rendue.