Une offre d’emploi de l’Université Laval a fait couler beaucoup d’encre dans les derniers jours. Le point litigieux est que le poste est réservé aux femmes, aux Autochtones, aux personnes en situation de handicap ou bien à celles faisant partie d’une minorité visible. On l’aura compris, les hommes blancs non handicapés sont d’emblée exclus du processus de sélection.

Ce n’est pas la première fois qu’on peut lire une telle politique de « discrimination positive » à l’université, et chaque fois les camps se braquent. Une telle attitude est d’ailleurs fortement compréhensible. Depuis la petite école, on nous répète, à raison, qu’on ne doit pas juger une personne en fonction de sa couleur de peau. L’offre d’emploi de l’Université Laval trahit en ce sens un certain idéal de société.

De l’autre côté, on justifie la prise en compte de la « race » en expliquant qu’il faut pallier les discriminations que subissent les personnes issues de la « diversité » en leur réservant des postes. On suit ici la logique du « retour du balancier ».

Il ne fait aucun doute que l’intention égalitaire derrière les mesures de discrimination positive est louable, mais les moyens sont néanmoins controversés. Il est donc permis de penser que d’autres moyens honoreront cette intention tout en atténuant le clivage dans la société.

Salaire ou couleur de peau ?

L’un des problèmes avec les critères de l’Université Laval est qu’ils catégorisent le parcours des candidats uniquement en fonction de leur couleur de peau, ce qui mène à des situations pour le moins paradoxales.

Comprenons bien que cette discrimination positive favorise la fille de Gregory Charles au détriment du fils d’une coiffeuse de La Tuque. Peut-on sérieusement penser que la première se butera à plus d’obstacles que le second durant son parcours scolaire et professionnel ?

On pourra toujours répondre que ces exemples sont anecdotiques et qu’ils font ombrage au fait que les « Blancs » reçoivent en moyenne un salaire plus élevé que les personnes « racisées ». Bien que le portrait statistique soit plus nuancé, admettons pour le bien de la réflexion qu’une telle tendance s’observe.

Mais, dans ce cas, pourquoi ne pas déterminer que c’est le salaire des parents qui est utilisé pour favoriser certains étudiants ou même certains candidats en début de carrière ? Ainsi, les personnes « racisées » bénéficieraient davantage d’une telle mesure, car elles sont surreprésentées dans les classes économiques défavorisées, sans pour autant que les minorités issues des classes aisées en profitent injustement.

C’est sans oublier qu’une telle mesure permettrait d’éviter de racialiser nos rapports sociaux, ce qui n’est pas le moindre des avantages, d’autant que c’est manifestement cette considération de la « race » qui divise autant les Québécois.

Un processus à améliorer

Cette solution plaira à certains, mais d’autres évoqueront sans doute les préjugés inconscients causés par les stéréotypes qui désavantageraient les personnes « racisées » dans le processus de sélection.

Mais si tel est le cas, il apparaît pour le moins contreproductif de rejeter « consciemment » des candidatures en raison de leur couleur de peau dans le but de combattre des préjugés inconscients.

Autrement dit, ce n’est pas en excluant des personnes du processus de sélection qu’on supprime ces préjugés. C’est plutôt en améliorant notre processus de sélection. Pensons par exemple à rendre les CV anonymes ou encore à instaurer des examens normalisés pour l’obtention d’un poste.

Une discussion à commencer

On ne peut épuiser ici la question de la discrimination positive. On ne touche en fait qu’à la pointe de l’iceberg. On oublie trop souvent que cet enjeu pose la question de l’égalité, ce qui est une question éminemment politique.

Pourtant, on ne traite pas la discrimination positive ainsi, car les administrateurs d’entreprise ou d’université verrouillent la question en appliquant des politiques pour le moins discutables. Du fait de la nature épineuse du sujet, il ne peut être laissé entre les mains de gestionnaires. Il doit être discuté sur la place publique. C’est ce que doit faire une société démocratique.

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