« Allez-y, libérez vos seins ! », nous enjoint la ministre responsable de la Condition féminine, Isabelle Charest⁠1. « Révoltétons-nous », nous suggère la chroniqueuse Isabelle Hachey⁠2, relatant cette « non-histoire » d’une jeune femme aux seins nus dans un parc. Euh, êtes-vous malades, mesdames ?

Il est vrai que l’égalité homme-femme est loin d’être atteinte, d’être chose faite. Chaque jour qui passe, on peut observer de près le « deux poids (des seins), deux mesures (de brassière) » qui pèse toujours, et très inéquitablement, dans la balance des sexes et, en 2022, des genres.

Il y a clairement encore beaucoup de travail à faire pour émanciper et protéger les droits des femmes, pour leur permettre d’être maîtres et maîtresses de leurs corps, de décider pour elles-mêmes, quel que soit l’enjeu. Mais de grâce, en ce qui a trait aux seins, mesdames et messieurs (et tous les autres entre les deux), gardez-vous une petite gêne, s’il vous plaît.

Même le « chest » des hommes (et dans certains cas, leurs tétons), on ne veut pas les voir dans les endroits publics.

Vous utilisez les transports collectifs ? Habillez-vous, bordel ! Vous allez à l’épicerie ? Mettez-vous un t-shirt, je vous prie. Vous allez faire des courses, couvrez-vous un minimum, pour le bien de tout le monde. Un peu de pudeur, comme on dit, un peu de retenue aussi. C’est une question de respect… des autres, avant tout.

Non, il n’y a pas que vos droits individuels qui existent. Non, vous n’êtes pas seul au monde comme dans la rue. Et non, on ne veut pas vous voir nu ni même à moitié nu.

Les seins à l’air à la plage, c’est une chose. Les seins à découvert au beau milieu de la rue, c’en est clairement une autre. Tout cela est une question de contexte et distinguons ici l’espace intime de l’espace public.

Dans votre salon, comme dans votre cour ou sur le bord d’une piscine, faites ce que vous voulez, on n’en a rien à cirer. Ça s’appelle votre vie privée, votre intimité. Mais dans l’espace public, en revanche, désolée, il y a des règles de civilité.

Dans l’espace public, à moins d’allaiter un bébé qui dépend de ce sein pour survivre, à moins d’être dans une création artistique, sur une scène de la Place des Arts dans une chorégraphie de Marie Chouinard entre autres exemples, non, on ne tient pas à voir vos seins, ni ceux des hommes ni ceux des femmes, de personne en fait.

Lorsque des individus dévoilent des parties intimes de leur corps dans l’espace public, on appelle cela de l’exhibitionnisme. Et il y aura toujours des voyeurs à proximité pour en profiter.

Dans le meilleur des mondes, évidemment que les femmes déambuleraient librement seins nus sans créer d’émois. Or, nous ne vivons pas dans ce monde idéal et utopique. Bien au contraire, le monde est mauditement malade.

Seulement dans les transports en commun, à Montréal comme ailleurs, savez-vous combien il y a de freaks, d’obsédés sexuels et de prédateurs de toutes sortes qui errent à la recherche de victimes potentielles et de proies faciles ? C’est plein.

Vous voulez vous mettre en position de vulnérabilité, voire en danger ? Allez-y, déshabillez-vous, exhibez vos nichons n’importe où. Mais de grâce, mesdames, ne le faites pas au nom de toutes les féministes.

Déjà qu’un bon nombre de femmes ont définitivement abandonné l’usage du soutien-gorge – et c’est leur choix. Or, est-ce que tout cela est vraiment sain pour vos seins, mesdames ? Voilà la question. Le temps passe, les modes aussi, mais la force gravitationnelle, elle, restera.

1. Lisez « “Allez-y !”, dit la ministre Isabelle Charest » 2. Lisez « Révoltétons-nous » Qu'en pensez-vous? Exprimez votre opinion