L’auteur s’adresse aux membres du groupe d’intervention spécial responsable de la gestion de la crise des passeports du gouvernement fédéral du Canada

En tant que nouveau citoyen canadien issu de l’immigration récente, je voudrais vous faire part de mon point de vue (qui, j’en suis sûr, n’est pas que le mien) sur les exigences à remplir pour pouvoir obtenir un premier passeport canadien.

L’actuelle crise provoquée par l’achalandage sans précédent des bureaux de Passeport Canada nous fournit une bonne occasion de réévaluer la pertinence et la valeur de certaines de ces exigences et de rationaliser le processus tout en le rendant plus démocratique.

Allons au fait : les exigences relatives à la nécessité d’indiquer un répondant et des références entrent en contradiction avec certains droits constitutionnels et de la personne. L’obligation de trouver des références et un répondant place les demandeurs de passeport, qu’ils soient d’origine immigrante ou non, dans une position quelque peu humiliante, celle de devoir convaincre d’autres personnes de leur permettre de jouir d’un droit qui leur est dû.

En effet, on est en droit de se demander si cette nécessité d’obtenir la caution d’une autre personne pour jouir des droits inhérents à la citoyenneté (celui de recevoir une pièce d’identité de son propre pays) est logique et juste.

Qui plus est, le fait de voir sa demande de passeport rejetée pour un motif tel que l’absence de références et d’un répondant équivaut à un déni du droit à la mobilité, qui est un droit constitutionnel, selon le paragraphe 6(1) de la Charte canadienne des droits et libertés, qui prévoit que « [t]out citoyen canadien a le droit de demeurer au Canada, d’y entrer ou d’en sortir », et de la personne, selon la Déclaration universelle des droits de l’homme, dont l’article 13 dit ce qui suit : « Toute personne a le droit de quitter tout pays, y compris le sien, et de revenir dans son pays. »

Le droit à la mobilité

Sans passeport, les citoyens restent pratiquement prisonniers de leur pays et sont donc privés de ce droit fondamental qu’est la mobilité. Au Canada, l’exercice de ce droit est à la merci du réseau de relations du demandeur de passeport. Je ne devrais pas être obligé de connaître assez de personnes prêtes à me rendre ce service pour pouvoir jouir d’un droit que je possède déjà. La mobilité n’est pas un privilège, mais bel et bien un droit constitutionnel et de la personne.

En troisième lieu, le bien-fondé pratique et technique des exigences relatives au répondant et aux références ne semble pas évident. Le Canada dispose déjà de tous les renseignements sur la personne, y compris ses données biométriques. Cela est d’autant plus vrai pour les nouveaux citoyens issus de l’immigration, qui ont dû fournir ces renseignements dans le cadre de leur demande de citoyenneté, et qui sont par ailleurs photographiés et filmés lors de la cérémonie d’attribution de la citoyenneté. Il serait logique que le passeport soit délivré automatiquement à tous les nouveaux citoyens et qu’il leur soit envoyé dans la même enveloppe que leur certificat de citoyenneté.

L’élimination ou l’allègement de ces exigences permettrait d’optimiser les opérations de Passeport Canada en accélérant les processus, mais aussi, et surtout, profiterait grandement à la démocratie canadienne et à l’accès réel et égalitaire de tous à l’exercice de leurs droits fondamentaux.

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