La Coalition avenir Québec (CAQ) proposait la semaine dernière d’augmenter les admissions en médecine de 660 places sur quatre ans⁠1. Cette proposition fait suite à celle du Parti libéral du Québec (PLQ), qui souhaite quant à lui augmenter les admissions en médecine de 1000 places sur cinq ans⁠2. Ces augmentations font partie d’une plus grande stratégie voulant contrer la pénurie de main-d’œuvre en santé et assurer un meilleur accès à la première ligne de soins, notamment en garantissant un médecin de famille à tous les Québécois.

En tant qu’étudiants en médecine, l’accès aux soins et la pénurie de main-d’œuvre sont au cœur de nos préoccupations pour l’avenir du système de santé québécois. Toutefois, nous sommes soucieux de la faisabilité de l’augmentation suggérée, qui risque de compromettre la qualité de l’éducation médicale au Québec. Les facultés de médecine font déjà face à une hausse historique du nombre d’admissions, soit une augmentation de 26,5 % de 2019 à 2025⁠3. Nous craignons que la saturation des milieux de stage ne nuise à la quantité et à la qualité de l’exposition clinique dont bénéficieront les apprenants en médecine, un enjeu que les investissements promis peuvent difficilement résoudre.

Nous sommes également d’avis que la hausse des admissions en médecine doit impérativement s’accompagner d’une hausse équivalente des postes en résidence pour assurer la rétention des effectifs médicaux dans la province. À cela s’ajoute le défi de convaincre les nouveaux étudiants en médecine de l’attrait de la médecine familiale, ce qui s’est avéré difficile dans les dernières années. En 2022, ce sont respectivement 75 et 65 postes de résidence en médecine de famille qui sont restés vacants à l’échelle du Québec. La plupart des postes non comblés se situaient en régions éloignées ou semi-éloignées.

Considérant la difficulté actuelle de recruter des médecins résidents pour pratiquer en région, l’enjeu semble encore une fois en lien avec l’attractivité de la pratique en région plutôt que le simple manque d’effectifs médicaux.

Nous invitons donc les partis politiques à ne pas sous-estimer les enjeux fondamentaux que sont la valorisation de la médecine en région et de la médecine de famille dans leur réflexion sur la hausse des admissions en médecine au Québec.

À cet effet, la Fédération médicale étudiante du Québec (FMEQ) avait déjà proposé aux élus en 2020 de bonifier la cote R des étudiants en provenance des régions pour favoriser leur admission, de créer des contingents d’étudiants provenant des régions semi-éloignées et éloignées et de rendre obligatoires les stages en milieu rural pour tous les étudiants en médecine du Québec. Nous avions également proposé plusieurs mesures pour favoriser l’attrait des étudiants vers la médecine de famille, dont le développement des programmes de compétences avancées ainsi qu’une diversité et une flexibilité des activités médicales particulières.

Par ailleurs, les médecins ne peuvent et ne doivent pas être la seule porte d’entrée vers le système de santé. Les partis politiques doivent miser sur la création de contextes organisationnels où le potentiel clinique de chaque professionnel de la santé est optimisé dans l’exercice de son expertise spécifique.

Pour une réelle approche interdisciplinaire en santé, la FMEQ suggère aussi d’inclure les services offerts par les professionnels de la santé autres que les médecins au panier de services couverts par la Régie d’assurance maladie du Québec (RAMQ).

En conclusion, la hausse des admissions en médecine telle que proposée par certains partis politiques nous semble déraisonnable vu la situation déjà critique dans les milieux d’enseignement médical. Plus encore, nous croyons fermement que sans actions concrètes pour la valorisation de la médecine de famille et de la médecine en région, la hausse des admissions n’aura pas les effets espérés sur l’accès à la première ligne et l’accès aux soins en milieu rural pour les Québécois et les Québécoises.

1. Lisez « La CAQ propose d’augmenter les admissions en médecine » 2. Lisez « Le PLQ promet 1000 étudiants en médecine de plus d’ici 5 ans » 3. Lisez « Le rôle essentiel des universités » Qu'en pensez-vous? Exprimez votre opinion