L’auteure réagit à la chronique de Rima Elkouri « Isabelle et sa petite renarde » ⁠1 évoquant la mort par surdose d’une jeune étudiante de 24 ans.

Le deuil d’un enfant est un des deuils les plus difficiles à vivre. En effet, la mort d’un enfant contrevient au cycle habituel de la vie. Peu importe son âge au moment du décès, l’enfant mort laisse un vide incommensurable pour le parent.

Les circonstances de la mort teintent aussi la façon dont le deuil sera vécu. Par exemple, certaines circonstances ne sont pas toujours reconnues à leur juste valeur ou n’attirent pas autant de sympathie que d’autres.

Des parents endeuillés d’enfants morts suite à la suite d’une surdose témoignent ne pas bénéficier du même soutien que ceux dont l’enfant est mort d’un cancer. Il en va de même pour tous les parents qui, selon les circonstances du décès (suicide, mort en lien avec un trouble de conduite alimentaire, tuerie associée à la criminalité, etc.), sont victimes des remarques désobligeantes ou du silence réprobateur des autres.

Mes 30 ans de pratique comme psychologue auprès des personnes endeuillées m’ont permis d’observer que la méconnaissance et le jugement qui en découle constituent un facteur de risque pour des complications lors du deuil des parents endeuillés.

Les troubles liés à une substance, les troubles addictifs, les troubles de conduites alimentaires, les troubles du contrôle des impulsions, les troubles dépressifs et anxieux, etc., sont des troubles mentaux. Lorsque les circonstances d’un décès sont en lien avec ces troubles, fréquemment, j’entends le parent se questionner sur ce qu’il aurait pu faire pour prévenir la mort de son enfant. Tout comme la tristesse et la colère, la culpabilité fait partie des manifestations affectives habituelles lors d’un deuil.

Or, encore plus souvent, j’entends des parents souffrir des remarques blessantes ou du silence empreint de jugement de leurs proches. La honte, la gêne et la culpabilité viennent alors teinter le processus de deuil.

Mourir d’une surdose, d’une conduite dangereuse ou d’un mal de vivre, c’est mourir d’une maladie mentale. Lorsqu’une personne juge l’enfant mort ou son parent, elle démontre qu’elle ne connait pas les particularités associées à ces troubles et elle affiche son ignorance quant au deuil.

Les groupes d’entraide et le soutien de professionnels s’avèrent alors des ressources importantes pour les parents. Or, afin de leur permettre de s’exprimer sans subir la stigmatisation qui se poursuit souvent après la mort de leur enfant, voici quelques comportements à éviter :

  • se tenir à l’écart du parent parce que vous vous sentez mal à l’aise en sa présence ;
  • omettre d’évoquer le nom de l’enfant ;
  • dire du mal de l’enfant ou le juger ;
  • dire que le parent aurait pu ou dû agir autrement ;
  • interpréter et chercher à analyser le comportement de l’enfant ;
  • se montrer curieux quant au trouble de l’enfant et aux circonstances du décès ;
  • dire que vous le comprenez, à moins d’avoir vous-même perdu un enfant ;
  • lui donner des conseils et lui dire quoi faire ;
  • changer de sujet lorsqu’il parle de son enfant ;
  • faire des remarques laissant entendre que son enfant n’a pas bénéficié de l’aide requise ;
  • le rassurer en disant que cela va bien aller et que le temps arrange les choses ;
  • trouver une explication ou une justification pour la mort (leçon morale, croissance personnelle, unité familiale) ;
  • et « parce que cela n’arrive pas qu’aux autres », informez-vous !

Quand il y a jugement, il y a souvent méconnaissance !

Lisez la chronique de Rima Elkouri « Isabelle et sa petite renarde » Lisez le grand reportage de Philippe Mercure « Surdose : l’épidémie invisible » Qu'en pensez-vous? Exprimez votre opinion