Les regards du monde entier se tourneront bientôt vers Charm el-Cheikh, en Égypte, où des milliers de scientifiques et de décideurs se rendront pour participer à la 27e Conférence des Nations unies sur les changements climatiques (COP27), qui aura lieu la semaine prochaine. Cette conférence annuelle est l’une des seules occasions pour la communauté internationale de se réunir afin de discuter d’actions collectives pour lutter contre les changements climatiques.

Or, nous n’avons pas les moyens de laisser passer une autre conférence faite de belles paroles, mais dépourvue d’actions. Les évènements météorologiques extrêmes sont une des nombreuses facettes du dérèglement climatique qui nous touche tous d’une façon ou d’une autre. Les Québécois n’ont certainement pas oublié la tornade qui a frappé Saint-Adolphe-d’Howard en juillet. Les inondations et les incendies de forêt demeurent de vifs souvenirs dans la mémoire des gens de la Colombie-Britannique. Enfin, l’est du Canada se remet encore des ravages causés par Fiona, qualifiée de « tempête du siècle ».

De l’avis de nombreux experts, tout cela n’est peut-être que le début d’une nouvelle normale. À moins, bien sûr, que le monde se décide enfin à agir collectivement.

À l’heure actuelle, nos politiques mondiales devraient entraîner un réchauffement de 2,7 °C d’ici 2100. Même dans le meilleur des cas, où 140 pays mettraient en œuvre des politiques de carboneutralité, nous serions quand même en voie d’atteindre un réchauffement de 1,8 °C, ce qui dépasse largement l’objectif de 1,5 °C fixé lors de la COP de Paris en 2015.

PHOTO THOMAS HARTWELL, ASSOCIATED PRESS

La COP27 aura lieu la semaine prochaine à Charm el-Cheikh, en Égypte.

Devrions-nous baisser les bras et accepter l’inévitabilité des changements climatiques ? Pas du tout. L’écart est immense entre un réchauffement de 1,8 °C et une hausse de 2,7 °C, et nous devrions tout mettre en œuvre pour réduire au minimum cette augmentation de la température.

Énergies propres

Remplacer les combustibles fossiles nous apparaît comme un but atteignable, mais comment ?

Le réseau électrique québécois est l’un des plus propres au monde, mais il n’a pas la capacité de décarboner l’économie en entier. Les énergies renouvelables sont essentielles pour accroître la capacité de notre réseau et nous donner les moyens de réaliser les transformations nécessaires pour atteindre les nouvelles cibles de décarbonation. Les centres urbains de toute la province doivent investir davantage dans la production et le stockage d’énergies propres.

Le Québec peut entreprendre cette transition en reprenant les 2 milliards de dollars consacrés annuellement à l’importation de gaz naturel et en les réinvestissant dans les ressources propres et adaptatives.

Une autre solution parallèle serait de diminuer notre demande en énergie. L’idée n’est évidemment pas de geler en hiver, mais bien d’adapter nos bâtiments.

Pour ce faire, il faut les moderniser et les rendre plus écoénergétiques, particulièrement les grands bâtiments. Au Québec, les bâtiments représentent plus de 27 % de la demande énergétique pour utilisation finale. Cette mesure permettrait d’alimenter plus de bâtiments avec notre réseau, et de les sevrer des combustibles fossiles. L’augmentation des crédits d’impôt pour la modernisation de ces bâtiments pourrait faire en sorte que nous en ressortions tous gagnants.

Et les constructions neuves ?

Une amélioration des codes du bâtiment est nécessaire pour nous assurer de réduire leur empreinte à vie sur la planète. Nous devons réglementer les quantités de carbone utilisées dans les nouvelles constructions.

Les transports figurent également parmi les principaux émetteurs de carbone au Québec. La province peut adopter trois approches complémentaires dans ce secteur.

Premièrement, encourager autant de gens que possible à opter pour les transports en commun. Pour cela, il faut doter davantage de quartiers et de villes d’un réseau public de transport collectif fiable. Deuxièmement, investir dans un système de mobilité électrique. Troisièmement, accroître les services de partage de véhicules électriques afin d’accommoder nos déplacements hors des zones urbaines desservies par les réseaux de transports en commun.

Les bâtiments industriels font également partie des grands émetteurs de carbone à l’échelle de la province. De nombreuses industries ont amorcé une transition partielle, mais le rythme auquel s’opèrent ces transformations est nettement insuffisant. La mise en place de certaines politiques gouvernementales – par exemple, réduire les limites des émissions de carbone des installations industrielles et leur accorder des incitations à investir dans la compensation carbone – inciterait sans doute les entreprises à accélérer ce virage.

Si certaines de ces politiques et mesures de transition peuvent sembler optimistes, nous attendons avec impatience leur mise en œuvre.

Considérant tout le potentiel économique et l’immense talent que recèle le Québec, je nous crois capables d’atteindre ces objectifs – c’est même essentiel. Toutefois, si nous souhaitons éviter le pire des changements climatiques, nous devons dès maintenant passer à la vitesse supérieure.

* Les travaux de recherche de Mostafa Saad portent sur la décarbonation des immeubles.

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