2018 : les transports en commun battent des records d’achalandage.

2019 : les transports en commun battent des records d’achalandage.

2020 : la pandémie met un frein brutal à cette lancée.

2023 : malgré la fin des restrictions de déplacement, la plupart des sociétés de transports en commun n’ont pas encore retrouvé les niveaux de fréquentation prépandémiques. Après trois ans de soutien budgétaire exceptionnel, les ordres de gouvernement supérieurs commencent à hésiter. L’investissement en vaut-il la peine ?

Après la réforme Ryan des années 1990, et alors que nous venions à peine de retrouver un véritable élan de développement entre le réseau 10 minutes à Montréal, le REM et le tramway de Québec, voilà que nous vivons une nouvelle crise des transports en commun.

Pourtant, rien n’a changé, ou presque. Vrai, les transports en commun sont moins fréquentés à l’heure de pointe. Mais tout le monde vous le dira : 2019, c’était aussi la grande époque de la « classe sardine », quand il n’était pas rare de devoir laisser passer un ou deux métros avant de pouvoir y monter. Quand en entendant crier, dans l’autobus, « Avancez par en arrière ! », on faisait péniblement un peu de place aux nouvelles personnes à embarquer.

Avant la pandémie, les transports en commun n’étaient pas pleins : ils débordaient. Leur occupation actuelle est probablement un meilleur équilibre que seule une comptabilité inadaptée nous incite à considérer comme insatisfaisante.

Fidéliser, développer

Aujourd’hui comme hier, les transports en commun sont une des clés pour sortir de notre dépendance à l’auto. Ils présentent une faible empreinte énergétique, environnementale et territoriale et, à l’inverse, des retombées économiques locales près de trois fois supérieures à celles de l’industrie automobile. C’est un mode essentiel pour son inclusivité, mais c’est aussi un mode remarquablement structurant, qui peut et doit devenir un premier choix pour une part croissante de la population.

Ce n’est vraiment pas le moment de lâcher les transports en commun, au contraire. C’est le temps de fidéliser la clientèle, et de développer pour aller chercher de nouveaux marchés. Les villes et les États qui ont fait ce choix ont presque tous retrouvé leur niveau d’achalandage prépandémique. Nous proposons deux stratégies pour y arriver.

D’un côté, à court terme, il faut miser sur la fréquence, toute la journée. Les spécialistes l’ont démontré : le plus dissuasif, dans les transports en commun, c’est l’attente (et le manque de fiabilité). Pas besoin d’attendre qu’un autobus déborde pour augmenter la fréquence.

Montréal voyait juste avec son réseau toutes les 10 minutes, et c’est cette cible qu’il faut viser, sur tous les réseaux, pour un maximum de parcours. Un bon réseau de transports en commun est un réseau où on n’a pas besoin de regarder les horaires de passage.

À l’inverse, réduire l’offre pour éponger les déficits serait absolument contre-productif et entraînerait une spirale négative.

De l’autre côté, pour être prêt à long terme et ouvrir de nouveaux marchés, il faut aussi investir dans de nouveaux projets structurants, y compris en mode lourd. Les projets en cours – prolongement de la ligne bleue, REM de l’Ouest, tramway de Québec – sont nécessaires, mais pas suffisants.

L’est et le nord-est de Montréal doivent être au moins aussi bien desservis que le sera bientôt l’ouest, avec un lien direct vers le centre-ville. Le projet de tramway de Gatineau doit se concrétiser. Lévis doit enfin avoir un réseau à la hauteur, et pourquoi pas un lien direct avec le centre-ville de Québec. Pourquoi les villes moyennes n’auraient-elles pas chacune leur parcours structurant ? Et pourquoi ne pas les relier par un réseau interurbain digne de ce nom ?

Partout au Québec, les transports en commun doivent devenir attractifs et structurants. Doublons l’offre pour la prochaine génération !

Alors que la ministre des Transports est en consultation sur le financement de la mobilité et que le Sommet Climat s’ouvre à Montréal, c’est le choix que doivent faire les villes et le gouvernement.

C’est maintenant qu’il faut construire le réseau de transport de l’avenir, celui dont nous aurons besoin pour soutenir, dans les prochaines décennies, un mode de vie à haute qualité de vie et à faible empreinte environnementale. Ce n’est pas le moment d’en faire moins, c’est le moment d’en faire plus. Il est temps de sortir de l’état léthargique pandémique pour retrouver l’ambition pour les transports en commun.

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