Après des décennies de promesses climatiques non tenues, le Rapport d’inventaire national1 publié le mois dernier a apporté une nouvelle longtemps attendue : les émissions de gaz à effet de serre du Canada sont enfin en baisse.

Cependant, une exception nuit aux progrès et menace la capacité du Canada à atteindre ses objectifs climatiques : le secteur pétrolier et gazier.

En 2021, le Québec a montré la voie au reste du pays en interdisant l’exploration pour les combustibles fossiles et en se joignant à l’alliance internationale « Au-delà du pétrole et du gaz » (Beyond Oil and Gas). Aujourd’hui, les députés québécois doivent faire pression sur leurs partis pour qu’ils saisissent la plus grande occasion qui s’offre au Canada de s’attaquer à la pollution : le plafonnement des émissions du secteur pétrolier et gazier.

Ce secteur qui représente 5 % du PIB du Canada est, depuis longtemps, le plus polluant du pays. En 2021, il était responsable de 28 % des émissions nationales. Ce chiffre pourrait même être sous-estimé d’après une récente étude. Alors que d’autres secteurs comme l’électricité et l’industrie lourde ont considérablement réduit leurs émissions, ceux du secteur pétrolier et gazier ont augmenté de 89 % depuis 1990.

Cet été, le gouvernement fédéral devrait dévoiler une réglementation visant à plafonner les émissions du secteur pétrolier et gazier : une étape cruciale qui imposerait une limite décroissante à la quantité d’émissions que les compagnies sont autorisées à rejeter dans le cadre de leurs activités nationales.

Les industries pétrolière et gazière travaillent d’arrache-pied pour affaiblir cette politique, mais les Canadiens y voient clair : un nouveau sondage d’Abacus Data2 montre que deux Canadiens sur trois estiment que l’industrie devrait être tenue de réduire ses émissions afin que le Canada puisse atteindre ses objectifs climatiques.

Toutes les régions sont majoritairement favorables à un plafonnement des émissions, mais c’est au Québec que l’enthousiasme est le plus fort, avec 68 % d’opinions favorables et seulement 14 % d’opinions défavorables, suivi de près par les provinces de l’Atlantique. Les électeurs du Parti libéral fédéral, du Bloc québécois et du NPD sont tous très favorables à l’idée d’obliger les sociétés pétrolières et gazières à plafonner leurs émissions (respectivement 72 %, 77 % et 81 %).

La leçon politique que doivent tirer les députés québécois est la suivante : un plafonnement des émissions ambitieux est une solution gagnante pour le climat soutenu par les Québécois.

Un plafonnement juste et ambitieux

Pour que le Canada fasse sa juste part dans la lutte contre les changements climatiques, ses industries pétrolière et gazière devraient réduire leurs émissions d’au moins 60 % par rapport aux niveaux de 2005 d’ici 2030. À tout le moins, le plafonnement devrait être équivalent à l’objectif national, à savoir une réduction de 45 % des émissions par rapport aux niveaux de 2005 d’ici à 2030.

Les sociétés pétrolières et gazières font de grandes promesses sur l’objectif de la carboneutralité d’ici 2050. Cependant, alors qu’elles engrangent des bénéfices records, elles n’investissent pas dans la décarbonation et la diversification.

Avec raison, les Québécois sont sceptiques quant à ces tactiques dilatoires : seuls 12 % croient que les entreprises pétrolières et gazières réduiront volontairement leurs émissions. Ils sont presque six fois plus nombreux à dire qu’elles ont besoin d’une réglementation.

Les industries pétrolière et gazière détiennent une forte influence à Ottawa, et nous risquons d’obtenir des mesures inefficaces et faibles qui permettent aux pollueurs de s’en tirer à bon compte. Nos députés se doivent de faire du bruit pour obtenir ce que leurs électeurs souhaitent : un plafonnement des émissions juste et ambitieux.

1. Lisez le Rapport d’inventaire national 2. Consultez les données du sondage d’Abacus Data (en anglais) Qu'en pensez-vous? Exprimez votre opinion