Pendant que le Québec était en état d’alerte en raison de pluies torrentielles provoquant des crues printanières inédites, l’Alberta faisait face à la pire éclosion d’incendies de forêt de son histoire, exacerbée par un temps particulièrement chaud et sec.

Les effets des changements climatiques sont de plus en plus visibles et appellent à l’action. Nous devons prendre conscience des limites de la planète et agir en conséquence pour que nos sociétés soient durables.

La complexité du défi exige une approche multidisciplinaire. Les conséquences dépassant largement nos frontières et le temps présent, il faudra penser loin dans le temps et loin dans l’espace pour dessiner des solutions. Il faudra aussi communiquer et informer largement toutes les parties prenantes puisque la société en entier doit se mobiliser. Au Québec comme ailleurs, l’éducation constitue assurément un élément clé.

Or, il y a quelques jours, le ministre Bernard Drainville déposait le projet de loi 23 ayant pour but de créer un Institut d’excellence en éducation. Malheureusement, du même coup, il prévoit retirer du mandat du Conseil supérieur de l’éducation (CSE) les ordres d’enseignement du préscolaire au secondaire.

Créé en 1964, le CSE est un joyau du système démocratique québécois. Cet organisme de consultation et de réflexion critique autonome, distinct des ministères de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur, a pour importante fonction de conseiller les ministres sur toute question relative à l’éducation.

Avec cette amputation, le ministre va priver le pilotage du système scolaire d’une précieuse vision longitudinale.

Pour l’enseignement supérieur, dont on attend tant de solutions, c’est une catastrophe.

J’ai eu l’immense privilège de contribuer aux travaux du CSE pendant 10 ans. Moi qui ne suis pas une experte de l’éducation, mais une ingénieure œuvrant dans une université d’ingénierie, j’étais un peu intimidée et curieuse de participer aux discussions portant sur les enjeux des « petites classes ». Eh bien, j’ai rapidement constaté que toutes les parties impliquées tiraient bénéfice de ce laboratoire d’idées. Les enjeux des élèves d’aujourd’hui sont ceux des étudiants de demain. Les travaux du CSE offrent donc une fenêtre cruciale à l’enseignement supérieur. En se nourrissant des perspectives du préscolaire jusqu’au secondaire, ils permettent aux cégeps et universités de s’adapter, et ce, avant que les vagues de changements ne les frappent de plein fouet. Voilà qu’on veut couper ce lien et cette vision holistique, bâtis à la table du Conseil depuis près de 60 ans !

Au moment où l’approche collaborative est réclamée partout pour avancer durablement, le ministre Drainville propose de supprimer ces analyses multidisciplinaires et de repousser les ordres d’enseignement dans des silos étanches. Pourquoi ? Qui voudrait se priver, en se préparant à une situation d’une ampleur jamais vue, de regards croisés conférant une compréhension plus complète et plus nuancée ?

Monsieur le Ministre, consultez vos experts du Fonds de recherche du Québec. Ils énoncent que la résolution de problèmes complexes exige la contribution de tous, une approche intersectorielle et des synergies entre les disciplines. Votre proposition ne va pas dans le bon sens.

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