En cette période de vacances pour les travailleurs de la construction, je me demande s’il n’y a pas lieu d’organiser également une période de vacances pour les sans-abri. Vous rigolez de ma suggestion ? Comment réaliser ce nouveau concept de vacances accessible aux sans-abri ? En leur offrant durant l’été un endroit sécuritaire dans une base de plein air loin des milieux qui contribuent à les maintenir dans des situations de dépendance à l’alcool, aux drogues et à la violence.

Qui va payer pour aménager ces sites de plein air ? Nous allouons déjà des sommes importantes pour le financement des organismes communautaires d’aide à l’itinérance, des centres d’hébergement, des coûts en santé ou en désintoxication, alors pourquoi ne pas investir dans des bases de plein air loin des tentations de dépendance qui se concentrent souvent dans les centres-villes, notamment à Montréal et à Québec où se retrouve la plupart des sans-abri au Québec ?

Notre devoir collectif consiste avant tout à rechercher des façons de briser l’isolement social des sans-abri. Tout un défi en effet, car même avec l’accès à un logement abordable, le sans-abri demeure toujours isolé et vulnérable aux dépendances ainsi qu’aux abus de toutes sortes, surtout s’il habite dans un quartier propice à l’itinérance.

Brisons l’isolement social des sans-abri

Je m’inspire de mon expérience personnelle, où lors de mes études collégiales et universitaires, j’ai pu travailler pendant plusieurs années dans des camps d’été pour jeunes défavorisés dont la plupart vivaient dans des foyers d’accueil.

Je peux témoigner du bienfait que représente le plein air pour des jeunes victimes de mauvais traitements et provenant de familles dysfonctionnelles.

Bien sûr, quelques semaines ou quelques mois pour vivre l’expérience du plein air ne signifient pas nécessairement une voie de sortie permanente de la pauvreté ou de l’itinérance. Mais elles peuvent s’ajouter à d’autres mesures économiques et sociales visant à briser le cercle vicieux de l’isolement social et économique des sans-abri. Car, qu’on le veuille ou non, le nombre de sans-abri augmentera sans cesse dans les prochaines années, dû notamment au manque de logements abordables et à la difficulté pour ces personnes « de maintenir des rapports fonctionnels, stables et sécuritaires dans la communauté » qui font face à « un processus de désaffiliation sociale et une situation de rupture sociale qui se manifestent par la difficulté pour une personne d’avoir un domicile stable »⁠1. J’y ajouterais également un milieu de vie épanouissant pour tous les citoyens.

Contrer la dégradation du milieu de vie dans les centres-villes

Je me questionne de plus en plus sur la pertinence des mesures d’atténuation et de prévention de l’itinérance au Québec. Le fait de concentrer les mesures d’aide dans les centres-villes là où se situent les sans-abri visibles me semble être contre-productif socialement parlant et ne favorise aucunement l’intégration sociale des sans-abri. En effet, à titre d’exemple, les sites d’hébergement comme la Mission Old Brewery à Montréal ou l’Auberivière à Québec se situent près des zones d’habitation, et les citoyens et commerçants constatent de plus en plus la dégradation de leur quartier par des méfaits et de la violence.

Puisque l’itinérance semble de moins en moins un phénomène passager, mais plutôt un facteur récurrent de dysfonctionnement social, ne pourrait-on pas réfléchir à déconcentrer l’itinérance en proposant d’autres milieux de vie loin des centres-villes ?

Les bases de plein air pourraient être l’une des solutions favorisant l’acceptabilité sociale des sans-abri, notamment après leur séjour en milieu hospitalier ou en cure de désintoxication.

Soyons créatifs, sortons de notre boîte pour maintenir notre fragile paix sociale qui sera de plus en plus mise à l’épreuve avec les changements climatiques et la dégradation de notre environnement, et d’autres phénomènes permanents (incendies, inondations, sécheresses, etc.) mettant à l’épreuve notre solidarité sociale.

1. Consultez le deuxième portrait de l’itinérance au Québec, MSSS Qu'en pensez-vous? Exprimez votre opinion