Alain Dubuc prétend que la note intitulée «À qui profite le Plan Nord?», publiée par l'IRIS et dont je suis l'auteur, serait un «torchon» truffé d'erreurs méthodologiques. Afin d'éclairer le débat, je tiens à rectifier certains des propos de M. Dubuc qui m'apparaissent infondés.

M. Dubuc conteste les chiffres de l'IRIS sur deux points. Le premier est l'entrée d'argent que le gouvernement recevra en redevances et impôts de toutes sortes sur 25 ans. Nous évaluons ce montant à 14,2 milliards$ en nous basant sur une étude économique du Mouvement Desjardins. Ce total provient des prévisions d'entrées fiscales du ministère des Finances qui a nécessairement pris en compte l'impact fiscal complet du Plan Nord sur 25 ans. En considérant que pour le moment, les projets présentés par le gouvernement sont quasi exclusivement des projets d'extraction minière et non de transformation des matières premières, il n'est pas surprenant que les prévisions de retours fiscaux ne soient pas très élevées. Avant d'accuser l'IRIS de manquer de rigueur, M. Dubuc aurait pu mieux étayer ses recherches et vérifier d'où provenait cette donnée.

L'autre critique de M. Dubuc provient de son impression injustifiée que, depuis le «début», les investissements de 80 milliards du Plan Nord ont été énoncés ainsi: 47 milliards d'Hydro-Québec, 30 milliards de l'industrie privée et 3 milliards provenant du gouvernement. Il est étonnant que le chroniqueur fasse une telle affirmation, basée sur des hypothèses de travail de l'étude de SECOR, alors que le document officiel du Plan Nord ne fait pas de distinction entre les investissements privés et publics.

Plus surprenant encore, près d'un an après l'annonce du Plan Nord, soit lors du dernier budget provincial, c'est un journaliste de La Presse, Hugo Fontaine, qui a identifié au sein du budget que les 33 milliards d'investissements seraient finalement privés et que le gouvernement y ajouterait 2 milliards de fonds publics.

Les prévisions de l'IRIS sur le Plan Nord ont été publiées alors que le budget provincial n'avait pas encore été présenté par le gouvernement. Dès que le budget québécois a annoncé ses nouveaux chiffres, nous avons rectifié nos conclusions. Ainsi, lorsque M. Dubuc prétend que «depuis le début», la ventilation des investissements du Plan Nord est connue et omet de mentionner que l'IRIS a changé ses conclusions, il manque une fois de plus de rigueur.

M. Dubuc omet également de signaler nos recherches sur les coûts sociaux que causera la croissance de la population dans le Nord. Nous évaluons ces coûts supplémentaires à 6,15 milliards sur 25 ans, des coûts qui ne seront pas diminués par l'annonce budgétaire.

Notons que la part dite «privée» d'investissements présentée lors du budget provincial n'a pas encore été définie, les projets d'investissements se faisant encore attendre. Pour le moment, parmi les quelques annonces d'investissement, on compte le projet de chemin de fer entre Sept-Îles et Schefferville qui sera un partenariat entre le CN et la Caisse de dépôt, et les investissements provenant d'Investissement Québec qui financeront une étude de faisabilité pour la construction d'un gazoduc pour Gaz Métro.

Ces projets sont considérés comme privés dans le plan du gouvernement, alors qu'ils sont financés à même des fonds gouvernementaux. Nous pouvons craindre légitimement que le Plan Nord propose aux Québécois de prendre une part importante des risques de développement du Nord alors que les corporations minières engrangeront les profits.

Les termes utilisés par M. Dubuc nous portent à croire qu'il accuse durement et sans vérification les travaux qui ne font pas l'éloge de la richesse privée aux dépens de la richesse collective.