Michel Audet, Françoise Bertrand, Lucien Bouchard, Marcel Boyer, Yves-Thomas Dorval, Joseph Facal, Pierre Fortin, Michel Gervais, Monique Jérôme-Forget, Robert Lacroix, Michel Leblanc et Claude Montmarquette.

La société québécoise fait face à un choix assez simple, mais qui semble difficile à accepter pour certains: devons-nous rehausser le financement de nos universités en demandant aux étudiants de payer une part raisonnable de leur coût de formation?

Pour une forte majorité de Québécois, et pour les deux tiers des étudiants, la réponse est oui.

Une société distincte fortement minoritaire en Amérique du Nord ne pourra se développer que si nous avons accès à des travailleurs hautement qualifiés ayant reçu une formation de première qualité. Les Québécois ont compris qu'il faut trouver un équilibre entre l'effort fourni par l'ensemble des contribuables et celui demandé aux étudiants.

Surtout, une grande majorité de Québécois reconnaissent la nécessité de mieux financer nos universités tout en se dotant d'un système bien calibré pour s'assurer de l'accessibilité aux études universitaires.

C'est d'ailleurs ce que nous avons proposé en février 2010, alors que nous unissions nos voix pour signer un pacte qui réclamait un meilleur financement de nos universités. Nous basions notre proposition sur quatre principes fondamentaux: l'accessibilité, l'équité, l'excellence et l'efficacité.

Dans le but de rapprocher les droits de scolarité québécois de la moyenne canadienne, nous avons proposé à l'époque une hausse de 1000$ par année pendant trois ans. Une telle hausse s'avère nécessaire pour rattraper le retard engendré par le gel des années précédentes.

Cette hausse devait s'accompagner selon nous d'un engagement formel du gouvernement à ne pas diminuer sa contribution, d'une bonification importante du régime de prêts et bourses et de la mise en place d'un programme de remboursement proportionnel au revenu.

Nous demandions aussi de différencier les droits selon l'établissement universitaire, le niveau d'études et le secteur disciplinaire pour refléter davantage les coûts de formation et les rendements personnels variables de l'investissement en éducation, ce qui permettrait de réduire les droits dans certains secteurs et de les augmenter dans d'autres.

Le gouvernement a annoncé dans son budget 2011 une augmentation des droits de scolarité de 325$ par an sur cinq ans. Puis, à la lumière de la réaction des associations étudiantes, le gouvernement a fait plusieurs concessions, la dernière étant d'étaler la hausse des droits sur une période de sept ans, ce qui revient à une hausse de 254$ par année. Il a également, comme le démontre éloquemment le fiscaliste Luc Godbout, bonifié substantiellement le régime de prêts et bourses, répondant aux préoccupations liées à l'accessibilité.

N'oublions pas que le gouvernement du Québec avait décidé dans son budget 2010 d'augmenter sa propre contribution à l'éducation supérieure et demandé une contribution supplémentaire du secteur privé afin d'éponger le déficit annuel récurrent des universités, d'environ 600 millions en 2010.

Bref, tous ont été appelés à pousser à la roue. Au tour des étudiants de s'engager.

Nous écrivions lors de la signature du pacte que «la situation exige que nous arrivions collectivement à une entente». Le temps est venu de s'entendre.

La contestation étudiante a depuis longtemps dépassé l'enjeu d'une simple augmentation des droits de scolarité. L'ampleur des perturbations qu'on fait présentement subir à la société québécoise n'entretient aucune mesure avec la portée de la décision gouvernementale.

Il est plus que temps de se ressaisir: il faut rétablir l'ordre, les étudiants doivent retourner en classe et tous les efforts doivent être déployés pour sauver un trimestre déjà terriblement compromis. Voici une situation où, au-delà de toute allégeance politique, la population doit donner son appui à l'État, ultime responsable de la paix publique, de la sécurité des personnes et de l'intégrité de nos institutions.

D'éventuelles élections donneront aux citoyens l'occasion de statuer sur le débat en cours et de départager les responsabilités de tous les intervenants. C'est ainsi que les sociétés démocratiques résolvent leurs conflits et font leurs arbitrages: dans l'urne plutôt que dans la rue.

Se trouvera-t-il des étudiants pour le rappeler à leurs pairs et, du même coup, aux leaders politiques de demain qui se pointent parmi eux? Incidemment, ne devons-nous pas attendre de ces derniers qu'ils fassent leur apprentissage démocratique en dénonçant les adeptes de la désobéissance civile?