La ministre conservatrice Josée Verner a condamné à son tour les propos du cardinal Marc Ouellet, qui s'est dit opposé à l'avortement même lorsque la grossesse résulte d'un viol. Elle assure que son gouvernement n'a pas l'intention de rouvrir le débat sur le sujet.

Le week-end dernier, la présidente de la Fédération des femmes du Québec, Alexa Conradi, avait affirmé que la droite religieuse «attaque le droit à l'avortement» et a l'oreille du premier ministre Stephen Harper, ce qu'elle juge «très inquiétant». «Sous les conservateurs, il y a eu cinq projets de loi privés pour criminaliser indirectement l'avortement. M. Ouellet fait lui aussi campagne là-dessus.»

Même si des députés conservateurs sont ouvertement pro-vie, «la position du gouvernement ne change pas. Nous, on ne rouvrira pas le débat sur l'avortement», a affirmé Josée Verner sur les ondes de RDI, lundi.

«Moi, je suis pro-choix. Je trouve qu'on ne doit pas laisser entendre qu'on pourrait rouvrir le débat sur l'avortement. Il n'en est pas question. C'est inacceptable», a-t-elle ajouté.

Controverse

Le gouvernement Harper a soulevé une controverse récemment en refusant de financer les programmes du G8 sur la santé maternelle s'ils incluent l'avortement. Le cardinal Ouellet a félicité Ottawa pour cette initiative lors de son passage remarqué au congrès de Campagne Québec-Vie, vendredi.

Les propos du primat de l'Église catholique canadienne ont continué de soulever l'indignation à Québec. Mais l'attention médiatique autour de cette affaire étonne l'ADQ, notamment la députée Sylvie Roy. «On a fait beaucoup de cas de ce qui me semblait conforme au personnage. Ce qu'il a dit, c'est gros, mais ça vient de lui. Il a droit à cette opinion , a affirmé Mme Roy qui n'appuie pas pour autant les propos du cardinal Ouellet . C'est comme s'il ne vivait pas dans un Québec contemporain. Pour les femmes qui sont victimes d'agression sexuelle, entendre des propos comme ça, c'est loin de les amener à se convertir», ajoute-t-elle. Le droit à l'avortement, «c'est un débat qui a déjà été fait au Québec, a-t-elle conclu. On ne reviendra pas en arrière sur cette question».

St-Pierre attristée

La ministre de la Condition féminine, Christine St-Pierre, abonde dans son sens : «Jamais on n'acceptera, nous les femmes et bien des hommes au Québec, de revenir aux broches à tricoter. Jamais.» Elle s'est dite attristée de voir ce sujet délicat et personnel revenir sur le tapis.

«Cette question est réglée, a-t-elle déclaré lundi d'un ton ferme lors d'un point de presse, en marge d'un discours prononcé dans le cadre du colloque Cultiver la ville. L'avortement, c'est une question intime. C'est la femme qui décide de ce qu'elle veut. Ce que nous avons, nous, comme société, comme devoir, c'est de faire en sorte que les choses se fassent de façon sécuritaire.» Elle a ajouté du même souffle que, à partir du moment où les femmes prennent cette décision difficile, elles ont le droit d'être entourées et accompagnées adéquatement.

«Mgr Ouellet a ses idées, a admis Mme St-Pierre. Ce qu'il faut dire, de notre côté, c'est qu'on n'est pas d'accord. On a évolué, on est rendus modernes. On ne veut pas revenir en arrière et je pense qu'on a une unanimité là-dessus. Ce n'est pas ça, le message de l'Église catholique. (C'est plutôt) un message d'amour.»

La titulaire de la Condition féminine réagissait aux déclarations du cardinal pour la première fois. Au cours de la fin de semaine, la chef du Parti québécois, Pauline Marois, la ministre responsable des Aînés, Marguerite Blais, avaient aussi vertement critiqué les propos du prélat.

Francine Doré, directrice du Centre de prévention et d'intervention pour les victimes d'agressions sexuelles à Laval, est «outrée» par les déclarations du cardinal Ouellet. Selon elle, ce dernier «n'est pas du tout placé» pour donner des leçons de moralité. «Mgr Ouellet doit regarder dans sa propre maison, et c'est là qu'il doit imposer un code de conduite, a-t-elle plaidé. On devrait mettre la loupe sur l'Église. Il faut regarder ce qu'elle fait avec les agressions sexuelles, comment elle cache ça, comment elle fait en sorte que ça ne sorte pas et qu'on minimise l'impact des agressions qui ont été commises» par des membres du clergé.