Le gouvernement Charest repousse la demande de Montréal qui réclame une enquête publique «dans les plus brefs délais» sur les allégation de fraude et de corruption qui ont nourri la controverse tout l'automne.

À l'Assemblée nationale hier, le premier ministre Charest a repoussé sans appel la demande de la chef péquiste Pauline Marois, appuyée sur la résolution unanime qu'avait adoptée le conseil municipal de Montréal la veille.

 

«Attendu qu'il faut redonner rapidement confiance à la population, il est nécessaire de faire toute la lumière sur les allégations de fraude et de corruption», a insisté la chef péquiste. Plus tôt, la Ville avait officiellement transmis sa demande «d'instituer dans les plus brefs délais une commission d'enquête publique».

La résolution de la Ville de Montréal s'ajoute aux demande d'une longue listes d'éditorialistes et de chroniqueurs, a rappelé Mme Marois. La Fédération québécoise des municipalités, qui témoignait hier en commission parlementaire sur le projet de loi destiné à clarifier l'adjudication des contrats municipaux, est revenue à la charge pour réclamer une enquête publique, a rappelé la chef péquiste.

Pour Jean Charest, «le gouvernement a déjà posé des gestes très importants». L'opération Marteau, dirigée par la Sûreté du Québec, coûtera 26 millions de dollars, a-t-il rappelé. Le ministre des Affaires municipales, Laurent Lessard, a déposé un projet de loi pour resserrer l'attribution des contrats par les villes. Monique Gagnon-Tremblay a fait de même au Conseil du Trésor.

Le ministre du Travail, Sam Hamad, est aussi à faire avancer l'étude d'un projet de loi pour resserrer les contrôles dans l'industrie de la construction, a aussi fait valoir M. Charest.

Sans même commenter la résolution de Montréal, M. Charest a rappelé que le gouvernement avait «posé des gestes immédiats» plus efficaces qu'une enquête dont les résultats prendraient plusieurs mois à se réaliser. Finalement, les enquêtes policières en cours sont un passage obligé. Même si Québec optait pour une enquête publique, «il faut qu'il y ait de la preuve, des faits. C'est une condition incontournable, peu importe les scénarios qui seront envisagés», a soutenu M. Charest.

Pour le député péquiste de Chambly, Bertrand St-Arnaud, les ingénieurs du gouvernement du Québec ont raison quand ils souviennent que c'est «pour éviter de mettre au jour un système au sein des ministères du gouvernement qui profite aux firmes privées d'ingénieurs» que Québec refuse de déclencher une enquête. Quand le ministre de la Sécurité publique, Jacques Dupuis, a fait la liste des nombreux corps policiers mobilisés pour enquêter, le péquiste a répliqué que les policiers eux-mêmes étaient favorables à une enquête publique. Leur syndicat a publiquement dit que les policiers ne pouvaient suffire à la tâche, le ministre Dupuis «est discrédité par ses propres policiers qui disent que ce n'est pas assez», a souligné M. St-Arnaud.

Pas de « mur à mur «

En fin de journée, en commission parlementaire sur le projet de loi 76 piloté par Laurent Lessard, le maire de Québec, Régis Labeaume, a exhorté Québec à ne pas faire du «mur à mur» dans les contrôles nouveaux sur l'adjudication des contrats simplement pour régler un problème dans la métropole.

Pour le maire Labeaume, il est déplorable que Québec ait à payer pour les erreurs de la métropole. M. Labeaume craint que la publication de tous les contrats sur l'internet, une obligation contenue dans le train de mesures proposées par le ministre Lessard, ne vienne alourdir la tâche de son administration. Cette disposition vise environ 1200 contrats de plus de 25 000$ alloués chaque année par la Ville.

«Si une Ville se comporte mal - et visiblement, ç'a été le cas de Montréal -, on n'est pas obligé d'écoper», a déploré le maire de Québec en commission parlementaire. «À l'avenir, j'ai envie de vous dire que s'il y a un problème à Montréal, faites donc des lois pour Montréal sans les étendre à tout le monde. (...) À un moment donné, on n'est pas obligé de payer pour les autres. Le mur à mur quand quelqu'un est pris en défaut, c'est achalant», a-t-il martelé.

Plus tard, Bernard Généreux, le président de la Fédération québécoise des municipalités, est venu approuver cette sortie.