Dans son rapport, le vérificateur ne manque pas de semoncer la Ville de Montréal parce qu'elle n'a pas négocié avec les cols bleus les tâches reliées au devis de performance. En clair, au lieu de faire appel à ses plombiers pour préparer la plomberie nécessaire à l'installation des compteurs d'eau dans les bâtiments industriels, commerciaux et institutionnels (ICI), la Ville a choisi de confier la tâche au secteur privé.

Au total, une centaine de plombiers provenant d'entreprises privées de Montréal, de Laval, de Westmount et même de L'Épiphanie, ont été accrédités aux frais de l'administration municipale. Leur première tâche consistait à visiter plus de 5000 entreprises de Montréal pour évaluer les coûts des travaux nécessaires à la venue des compteurs d'eau.

En janvier 2009, au cours d'un entretien avec La Presse, Louis Provencher, chef du projet, avait expliqué que la prochaine étape consistait à former les cols bleus, «tranquillement». Mais selon le président du syndicat des cols bleus, Michel Parent, qui qualifie l'affaire des compteurs d'eau «du plus grand scandale de toute l'histoire de l'hôtel de ville» les cols bleus n'ont jamais bénéficié de la formation menant à l'accréditation pour effectuer des travaux préparatoires, installer et entretenir les compteurs d'eau.

«À l'époque, quand l'approche du contrat des compteurs d'eau a été mise en place, j'ai rencontré l'ancien directeur adjoint, Yves Provost, ainsi que le responsable de la gestion de l'eau, Réjean Lévesque, pour leur expliquer que nous étions capables de faire le travail à l'interne. La réponse qu'on a eue c'est non, point final. Ils ont dit strictement pour question de garantie.»

M. Parent ajoute que les cols bleus ont pourtant l'expertise. «En donnant l'entretien à l'extérieur, pour une période de 15 ans, la Ville de Montréal allait perdre complètement son expertise et devenir à la merci du secteur privé pour le futur», estime le président des cols bleus.

Diversion

Le président du très puissant syndicat des cols bleus a par ailleurs joint sa voix à celle de la présidente du syndicat des cols blancs, Monique Côté, hier après-midi, pour commenter le rapport des compteurs d'eau et la décision du maire d'annuler les contrats avec le consortium GÉNIeau.

Les deux dirigeants s'entendent pour dire que si la Ville de Montréal ne veut pas créer de «favoritisme», elle a intérêt à conserver son expertise. Et que l'administration municipale devrait commencer par regarder «à l'intérieur afin d'évaluer combien ça coûte avant de recourir aux entreprises privées».

«Encore une fois, déplore Monique Côté qui représente 10 000 fonctionnaires, on ne parle pas des élus ou du secteur privé. Ce sont les fonctionnaires publics qui sont éclaboussés par les compteurs d'eau, même s'ils ne sont pas à l'origine des irrégularités.»