Des membres du personnel du centre hospitalier universitaire Sainte-Justine sont sortis jeudimidi pour réclamer la vaccination de leurs enfants dès que possible, et à l'intérieur même de l'établissement. Ils craignent que la hausse de l'absentéisme au sein des équipes ne nuise au fonctionnement de l'hôpital.

«Pour gérer le personnel, c'est tout à fait invivable. On a toujours l'élastique étiré parce qu'on manque de personnel. Malheureusement, comme les gens n'ont pas pu encore faire vacciner leur famille, ils peuvent s'absenter du travail pour faire vacciner leurs enfants ou encore pour en prendre soin parce qu'ils sont malades. On veut être là, alors on doit faire vacciner nos familles ici», a déclaré la Dre Diane Francoeur, chef du département d'obstétrique et de gynécologie de l'hôpital.La campagne de vaccination des membres du personnel de l'hôpital Sainte-Justine s'est terminée jeudi à midi. D'après la direction de l'hôpital, environ 90% des travailleurs se sont prévalus du vaccin. Les médecins demandent maintenant d'utiliser les doses restantes pour vacciner immédiatement les membres de leur famille et ceux de leurs collègues.

«On va être obligés d'annuler des opérations, annuler des cliniques pour que les gens aillent faire la queue pour avoir un petit coupon, et on trouve ça tout à fait ridicule. Si M. Bolduc disait oui, demain on s'arrangerait pour faire vacciner tous ceux qui en auraient besoin», a ajouté la Dre Francoeur.

Bolduc ne fléchit pas

En conférence de presse, le ministre de la Santé, Yves Bolduc, n'a toutefois pas fléchi: «Si on commence à vacciner la famille des 280 000 travailleurs de la santé et des 20 000 professionnels, on retarde de deux, trois semaines, voire un mois les clientèles prioritaires. Le risque pour ces gens-là d'être malade est le même risque que pour les autres dans la société.»

Le personnel de Sainte-Justine n'entend pas organiser de moyens de pression, mais prévient le ministre que la hausse de l'absentéisme entraînera des problèmes de fonctionnement à l'hôpital. La Dre Diane Francoeur a rappelé que le plus fort de l'épidémie était prévu pour la mi-novembre: «Dans 14 jours, nous allons être dans le trouble.»

À ses côtés, Nathalie Leroux, gynécologue-obstétricienne, a expliqué qu'elle devra s'absenter la semaine prochaine pour faire vacciner ses enfants. Son conjoint, anesthésiste, ne peut quitter le travail sans entraîner le report d'interventions importantes. Entre les deux clientèles, le couple a choisi celle pour laquelle les conséquences étaient les moindres.

«Je vais devoir quand même annuler une cinquantaine de patientes, des patientes que j'ai à coeur. Mais il faut que je m'occupe de mes enfants en premier pour pouvoir continuer de travailler par la suite», a expliqué la Dre Leroux.

Louis Godin, président de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec, appuie la demande de ses collègues. «La pression sera énorme sur le corps médical au cours du prochain mois, a-t-il dit. Il faut avoir tout notre personnel disponible pour y faire face.»

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Retrait préventif pour les femmes médecins enceintes

À l'instar des infirmières, les femmes médecins enceintes qui travaillent avec une clientèle susceptible de leur transmettre la grippe A (H1N1) pourront bénéficier d'un retrait préventif, assure la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec (FMOQ). «Les femmes qui travaillent dans les urgences, dans des cliniques de grippe ou aux soins intensifs seront réaffectées à des tâches médico-administratives ou seront mises en disposition à la maison avec compensation en attendant que l'on puisse les réassigner», a expliqué jeudi à La Presse le président de la FMOQ, Louis Godin. La FMOQ s'attend à réaffecter au maximum 180 médecins dans la province. Avant d'obtenir un retrait préventif, les médecins devront obtenir une recommandation de leur médecin traitant.

- Daphné Cameron