Les allégations de torture dont font état les médias canadiens depuis maintenant plus de deux ans ne nuisent en aucune façon aux efforts des militaires en vue de gagner la confiance de la population, en Afghanistan, semble-t-il.

Et la raison en est bien simple, d'après le commandant canadien sur place: les Afghans n'en entendent pratiquement jamais parler.

«Cette interprétation-là en est une qui est presque inconnue de la majorité des Afghans», a déclaré en conférence téléphonique depuis Kandahar, mardi, le brigadier-général Daniel Ménard, commandant de la Force opérationnelle interarmées (FOI) en Afghanistan. Il a expliqué que les nouvelles circulent très peu, dans ce pays ravagé par des décennies de guerre, puisque les moyens de communication et d'information y sont extrêmement limités.

De plus, les Afghans s'éloignent rarement à plus de 10 kilomètres de leur village natal.

«Et ça c'est ceux qui ont voyagé, a ajouté M. Ménard. Et je ne parle pas des enfants, je parle des gens dans la quarantaine et la cinquantaine. Si on connaît l'espérance de vie, ici, ce sont des gens qui sont considérés quand même assez âgés.»

Le militaire a nié au passage que les Canadiens aient pu eux-mêmes traiter de manière inappropriée les prisonniers qu'ils ont transférés aux forces de sécurité afghanes.

«Tout comme chez nous, lorsque quelqu'un est arrêté il n'est pas (nécessairement) coupable, a-t-il souligné. On doit le soumettre à un système qui est leur système et, de là, une décision est prise.»

«Les gens qui sont proches de l'incident réalisent pleinement ce qui se passe, a noté Daniel Ménard au sujet des Afghans. Les gens qui sont loin de l'incident n'en sont pas conscients du tout.»

La police militaire canadienne a affirmé par communiqué lundi soir que les soldats visés par des dizaines d'allégations avaient agi comme il se doit avec leurs détenus. Une de ces accusations demeure cependant sous enquête.

Les allégations formulées entre 2006 et 2009 faisaient entre autres état de détenus qui auraient été forcés de se convertir à une autre religion ou qui n'auraient pas été autorisés à aller aux toilettes.

Des résultats visibles d'ici quelques mois

Le brigadier-général Ménard a par ailleurs estimé que l'insurrection talibane pourrait être sérieusement affaiblie d'ici l'été prochain.

Il a fait valoir que trois unités de combat américaines se sont récemment ajoutées aux troupes qui sont à sa disposition dans le sud de l'Afghanistan, et qui totalisent maintenant 5200 soldats.

«Ceci est sans précédent, a-t-il lancé. Les forces américaines n'ont jamais renforcé un commandement de combat étranger d'un bataillon depuis la Deuxième Guerre mondiale.»

Cette nouvelle force de frappe vient complètement changer la donne, selon lui.

Ainsi, la FOI se concentrera davantage sur les centres urbains.

«Avec plus de 5200 troupes sous mon commandement, on est en mesure maintenant de dominer plusieurs de ces endroits-là», a indiqué le commandant canadien, en précisant que plusieurs soldats vont s'y installer et y vivre avec la population locale.

De plus, la FOI aura désormais le loisir de choisir le lieu et le moment des combats, d'après M. Ménard. Il a dit s'attendre à ce que les affrontements se déroulent plus loin des secteurs densément peuplés.

Jusqu'ici, les insurgés avaient souvent pu dicter leur volonté et placer les soldats de l'OTAN sur la défensive.

Le Canada a prévu de mettre fin à sa mission de combat et de rapatrier ses 2800 soldats en 2011.