C'était jour de paye chez le Canadien, hier. Des petites enveloppes lourdes des salaires faramineux qui leur sont versés attendaient les joueurs dans leur casier au retour de l'aréna Martin-Lapointe, où le Tricolore s'est entrainé.

Tom Kostopoulos, qui venait de jeter un coup d'oeil sur son chèque, affichait un large sourire.

Un sourire de quelle valeur?

On ne lui a pas demandé. Mais le calcul est simple.

 

Kostopoulos touche un salaire annuel de 900 000$ réparti sur les 186 jours que dure la saison pour les fins administratives. Cela représente un salaire quotidien de 4838,71$, donc une paye de 72 580,65$ pour 15 jours. Une somme de laquelle on doit bien sûr soustraire les retenues gouvernementales, les assurances, et les cotisations syndicales.

Ne vous en faites pas trop pour lui, ni pour Andrei Markov, le plus haut salarié de l'équipe (5,75 millions) avec une paye brute de 463 709,68$, et leurs coéquipiers. Ils seront tous en mesure de faire leur épicerie ce matin...

Kostopoulos a toutefois perdu son sourire devant les journalistes.

Cela n'avait rien à voir avec son taux d'imposition.

Mais bien avec la recommandation formulée par son patron Bob Gainey, jeudi, lors de la réunion des directeurs généraux. Une proposition qui interdirait aux joueurs de glisser, patins devant, pour bloquer des tirs ou intercepter des passes et qui aurait pour objectif d'augmenter les occasions de marquer.

«C'est une idée intéressante», a simplement dit Kostopoulos, avec une moue éloquente.

«Je suis content que cette proposition n'ait pas été déposée il y a 15 ans», a ajouté l'entraîneur-chef, Guy Carbonneau.

L'un des meilleurs joueurs défensifs de son époque, Carbonneau était un as pour bloquer des tirs en glissant devant les rondelles. Comme Steve Bégin, qui voit dans cette proposition une autre embûche à surmonter pour les joueurs de son style.

«C'est évident qu'une interdiction comme celle-là me priverait d'un outil. Je ne suis donc pas le bon gars pour dire que c'est une bonne idée. Mais comme nous l'avons fait avec les autres changements, il faudra suivre la parade et s'adapter», a mentionné le vaillant attaquant québécois.

À titre de gardien, Carey Price ne voit pas cette recommandation d'un bon oeil. «J'ai la chance de compter sur un groupe de gars qui réalisent plus d'arrêts que moi dans un match. Je ne voudrais pas qu'on change les règles. Surtout qu'un gars comme Mike Komisarek est le meilleur de la Ligue à ce chapitre. Je serais bien fou de ne pas vouloir profiter de ce gars imposant qui occupe beaucoup de place devant moi.»

Selon la proposition de Gainey, Komisarek ne serait pas trop désavantagé. Car s'il est vrai qu'il bloque beaucoup de tirs, le pilier à la ligne bleue du Canadien s'allonge rarement, respectant ainsi la condition évoquée par son patron, soit d'avoir une lame de patin toujours en contact avec la patinoire.

«Les gars sont tellement rapides aujourd'hui qu'on ne peut plus se compromettre. Je m'assure d'occuper les lignes de tir. Mais je dois aussi être en mesure de réagir s'ils décident de tenter de me contourner. Ce que je ne pourrais faire une fois étendu», a expliqué Komisarek.

Aux yeux de Carbonneau, la règle proposée par son patron vise une autre cible que simplement les tirs bloqués.

«J'ai parlé avec Bob de ce sujet et nous avons regardé des bandes vidéo. Ce qu'il tente d'éliminer, ce sont surtout les glissades des défenseurs qui s'allongent pour bloquer des passes dans les descentes à deux contre un.»

Un changement souhaitable, selon Carbonneau.

«La nouvelle Ligue nationale est axée sur la vitesse et l'attaque sans que cela devienne un cirque. Personne ne veut voir des scores de 12-10, mais on veut offrir un meilleur spectacle. Quant aux joueurs pénalisés, on ne peut rien y faire. Il y a des gars qui ont mis fin à leur carrière après l'abolition de l'accrochage. D'autres les ont remplacés et le spectacle s'est amélioré. Ça fait partie du développement du sport. Cela dit, je ne crois pas que ce changement sera adopté rapidement. Je ne sais même pas s'il sera adopté», a conclu Carbonneau.