Du 18 au 20 juin, Pierre Lavoie roulera pas moins de 1000 km qui le mèneront de La Baie à Montréal, avec des détours par Thetford Mines, Gatineau et d'autres villes de la province. Il sera accompagné de 750 cyclistes amateurs, qui se relaieront durant le trajet. Le but: amasser de l'argent pour combattre les maladies orphelines et pour promouvoir l'activité physique et la bonne alimentation auprès des jeunes. Entrevue avec l'homme derrière le Grand défi Pierre Lavoie.

Q : En 2005, dans le Défi Pierre Lavoie, vous avez parcouru 650 km dans votre région. Maintenant, l'activité se nomme le Grand Défi Pierre Lavoie, et vous vous rendez du Saguenay jusqu'à Montréal, où des jeunes de tout le Québec vous accueilleront. D'où est venue l'idée de cette nouvelle mouture?

 

R : En 2005, je parlais à l'école primaire Saint-Ambroise au Lac-Saint-Jean. Un jeune m'a demandé: «Est-ce qu'on peut rouler dans votre Défi?» Bien sûr, il ne pouvait pas vraiment! Je roule à 35 km/h durant plus d'une journée, et je passais dans son village à environ minuit. J'ai alors eu une idée: inviter les jeunes à pédaler un petit kilomètre avec moi, mais à une condition. Ils devaient se mettre en forme. Je leur ai proposé de faire le plus de séances de 15 minutes d'activité physique, et de demander à leurs parents de faire la même chose. On a inscrit 65 écoles de la région. On a ensuite voulu étendre le projet au reste de la province, mais ça a un peu tardé (...). On a finalement lancé le Grand Défi en 2009.

Q : S'agit-il seulement d'une randonnée?

R : Non. Le Grand Défi comprend deux volets: la randonnée pour amasser de l'argent, et nos activités auprès des jeunes. Ces activités se déroulent durant toute l'année. On visite les écoles primaires de tout le Québec avec notre grande caravane de deux étages. En haut, il y a un dôme et plusieurs vélos d'entraînement et des jeux vidéo éducatifs.

Q : Y a-t-il un volet compétition?

R : Oui, les écoles sont en compétition. On leur demande de faire le plus de blocs de 15 minutes d'activité physique. Pour faire participer toute la communauté, si un jeune convainc son parent de faire un bloc, les minutes s'ajoutent au total de l'école. L'année dernière, la meilleure école de chaque région a été invitée à nous accueillir à la fin de la randonnée au Stade olympique. Cette année, c'est un peu différent. On fait un tirage dans chaque région. Mais toutes les écoles ne sont pas admissibles. On donne seulement un billet de tirage aux écoles qui atteignent le niveau bronze, deux billets à celles qui atteignent le niveau argent, et trois billets à celles qui atteignent le niveau or.

Q : Combien d'écoles sont admissibles au tirage?

R : Environ 250, sur un total de 1152 qui participent au projet. Donc, environ une école sur cinq réussit à atteindre le niveau bronze ou mieux. Le niveau bronze équivaut quand même à 90 minutes de sport quotidien par jeune. Il faut garder la barre élevée pour les forcer à se dépasser! Je pense qu'on a vraiment réussi à lancer un mouvement.

Q : Parlons maintenant de la randonnée qui se déroule la fin de semaine prochaine. Où va l'argent amassé?

R : On a 150 équipes inscrites, qui paient chacune 10 000$. Ça fait donc 1,5 million. L'argent est géré par notre Fondation. Il sert à deux choses: financer la recherche sur les 750 maladies dites orphelines, qui touchent 1 Québécois sur 20. Et financer des projets dans des écoles primaires qui font la promotion d'un mode de vie sain.

Q : Lors des premières présentations du Défi, l'argent servait à financer la recherche sur l'acidose lactique, une maladie dont sont morts deux de vos enfants (voir encadré). Pourquoi avoir élargi le mandat?

R : Moi, je n'amasse pas de l'argent pour amasser de l'argent. Il faut que ça serve à un projet. Et on avait assez d'argent pour mener nos recherches sur l'acidose lactique. On a donc décidé d'utiliser l'activité pour financer un autre projet.

Q : Pourquoi viser les jeunes?

R : L'obésité a triplé chez les jeunes Canadiens dans les 20 dernières années. Pour la première fois dans l'histoire moderne, la prochaine génération vivra moins longtemps que ses parents, à cause de l'obésité et de la sédentarité. L'Association des pédiatres du Québec nous confirme que des enfants de seulement 12 ans contractent maintenant un diabète de type 2 (non héréditaire, lié aux habitudes de vie). Ils risquent une crise cardiaque avant d'avoir atteint la trentaine.

Q : Vous dites que c'est devenu un problème économique?

R : Le gouvernement dépense déjà 47% de nos impôts en santé, et les besoins augmentent avec le vieillissement de la population. Mais on peut difficilement faire plus. L'argent est limité. Et il y a un coût à tout ça. Ce qu'on investit en santé, on ne l'investit pas dans d'autres programmes comme l'éducation, qui est pourtant la clé de l'avenir d'une société. Si on veut améliorer la santé, au lieu d'investir dans le curatif, il va falloir qu'on investisse chacun en soi-même. Il faut se responsabiliser.

 

Qui est Pierre Lavoie?

Jeune adulte, Pierre Lavoie est un fumeur sédentaire qui travaille dans une usine de pâtes et papiers du Saguenay. En 1996, à 32 ans, il décide de se mettre en forme. Il découvre sa prodigieuse endurance. Commence alors une carrière amateur, puis professionnelle, de triathlète Ironman - pas moins de 3,8 km de nage et 180 km de vélo, suivis d'un marathon (42,2 km). Mais le malheur s'acharne rapidement sur sa famille. Son deuxième enfant, Laurie, est atteinte de l'acidose lactique, rare maladie congénitale. Elle y succombera en 1997. Son troisième, Raphaël, en souffrira aussi. En 1999, Pierre Lavoie décide d'utiliser ses remarquables talents pour combattre la maladie. Il pédale 650 km dans sa région pour amasser de l'argent servant à financer la recherche sur l'acidose lactique. Ainsi naît le premier Défi Pierre Lavoie. Tristement, son jeune fils meurt quelques mois après la première présentation du Défi. Il a depuis eu une petite fille, Joly-Ann, en santé.