L'un des rôles de l'école, c'est de donner accès à la culture. Tout le monde a son opinion au sujet de ce que les élèves devraient lire ou voir. Eux aussi.

Les fourberies de Scapin, c'était nul. «Je n'ai pas compris ce qu'il y avait de drôle», avoue Christophe Jomphe. «C'était long et zéro en lien avec notre réalité à nous», renchérit Kim Barrette. La critique est unanime: aucun des cégépiens que La Presse a rencontrés au cégep de Lanaudière, à Terrebonne, n'a apprécié cette comédie de Molière.Les études collégiales impliquent un contact forcé avec la culture. Les cours de français qu'on y donne sont d'abord des cours de littérature, avec ce que cela suppose de lectures imposées et, dans une moindre mesure, de sorties obligatoires au théâtre.

Ces mariages forcés ne donnent pas toujours de bons résultats. Scapin fut un four. King Dave, au contraire, a remporté un grand succès. Aucun des cégépiens rencontrés ne se rappelait le titre du spectacle solo écrit et interprété par Alexandre Goyette, mais tous avaient adhéré à son récit de la descente aux enfers d'un jeune homme en colère. «C'était super intéressant. Parfois on restait surpris et, après, on rembarquait dans l'histoire. J'ai vraiment aimé cette pièce-là», raconte Audréanne Allard.

Se faire imposer des lectures ou des sorties peut contribuer à élargir leurs horizons, admettent la plupart des élèves interrogés. Ce qui ne signifie pas que la question ne suscite aucun débat. Kim Barrette et son amie Julie Lauzon ont même des opinions diamétralement opposées - et passionnées! - sur le sujet.

«Ce que j'aimais, au secondaire, c'est qu'on avait le choix du livre, contrairement au cégep, où on nous l'impose. J'ai de la misère avec ça parce que ce n'est pas nécessairement un genre que j'aime, déplore Kim Barrette. J'ai lu un livre de 600 pages en cinq jours et mon livre obligatoire de 250 pages, je me tanne de le lire. Je me suis endormie dessus un million de fois...»

Julie Lauzon estime pour sa part que non seulement les livres imposés l'incitent à lire des oeuvres qu'elle n'aurait pas lues autrement, mais qu'une liste de suggestions ne suffit pas. «Si Thérèse Raquin (Émile Zola) avait été dans la liste, jamais je ne l'aurais choisi, reconnaît-elle. L'imposer, ça ouvre nos horizons. Au dernier trimestre, j'ai lu Dieu et nous seuls pouvons, de Michel Folco. Je l'ai adoré! Je le conseille à tout le monde, mais jamais je ne l'aurais lu de moi-même.»