Omar Khadr n'a pas de remords, il est en colère et rancunier, encore influencé par sa famille d'«extrémistes», et il macère actuellement dans un environnement d'islamistes radicaux, a soutenu hier un psychiatre venu témoigner, en faveur de la poursuite, sur le degré de dangerosité du détenu canadien, qui a plaidé coupable lundi à cinq chefs d'accusation pour crimes de guerre.

Dans un témoignage de deux heures, le Dr Michael Welner a dressé un portrait qui tranche radicalement avec l'image d'Omar Khadr que tentent de projeter ses avocats.

Selon le psychiatre, qui sera contre-interrogé aujourd'hui par la défense dans un exercice qui s'annonce très serré, le jeune condamné s'est radicalisé depuis son arrivée à Guantánamo, il y a huit ans, et il serait aujourd'hui «très dangereux». Pour appuyer ces affirmations, le Dr Welner cite le fait qu'Omar Khadr est très pratiquant, qu'il a mémorisé le Coran et qu'il dirige souvent la prière dans le camp #4, où il est incarcéré.

Or, il s'agit du campement de la prison de Guantánamo où sont rassemblés les détenus les plus coopératifs et respectueux des règles: ils vivent en communauté, pratiquent des sports et passent beaucoup de temps à l'extérieur.

Avec exubérance, le Dr Welner a dépeint un «djihadiste radical» qui ne pourrait pas selon lui être réhabilité, au moment même où le gouvernement américain a conclu une entente avec ses avocats. Après une année de détention supplémentaire à Guantánamo, le détenu de 24 ans sera en effet transféré au Canada, où il pourrait vraisemblablement être libéré après seulement quelques années, dans le respect des lois canadiennes.

Le psychiatre a aussi prétendu qu'Omar Khadr avait attiré plus d'attention sur Cuba que Fidel Castro.

«Il a tué, il a été membre d'Al-Qaïda, et nous sommes encore en guerre», a lancé le Dr Welner.

Ce que Khadr «savait»

Les sept membres du jury au procès d'Omar Khadr ont commencé hier à entendre les témoins du gouvernement américain, en vue d'établir la peine qui devrait être imposée au premier prisonnier de Guantánamo reconnu coupable de meurtre.

Le juge Patrick Parrish a aussi rendu public en matinée l'énoncé des faits, signé par Omar Khadr le 13 octobre dernier, lorsqu'il a accepté de plaider coupable aux cinq accusations, dont celles de tentative de meurtre, de complot, d'espionnage et de soutien au terrorisme.

Le document affirme que le jeune Khadr «savait» que son père finançait les opérations et les camps d'entraînement d'Al-Qaïda, qu'il se décrivait lui-même comme un «terroriste» membre d'Al-Qaïda et que ça lui a fait «plaisir» d'apprendre que la grenade lancée le 27 juillet 2002 avait tué un soldat américain. La défense avait toujours argué que ses aveux avaient été faits sous la torture et la menace.

Décrit comme un «combattant ennemi illégal», Omar Khadr n'était pas protégé par la convention de Genève relative au traitement des prisonniers de guerre, soutient l'énoncé des faits, parce qu'il ne répondait aux critères, ne faisant pas partie d'une armée ou d'une milice organisée.

On y apprend aussi qu'Omar Khadr a révélé aux autorités américaines l'emplacement des engins explosifs improvisés que ses complices et lui avaient dissimulé dans le sol, et qui ont donc pu être enlevés sans causer le moindre dommage.

Capturé à 15 ans par l'armée américaine, il a passé plus du tiers de sa vie dans la controversée prison de Guantánamo, que le président Barack Obama avait promis de fermer à son arrivée au pouvoir.