«Tout le monde attend des comptes rendus. On sent une pression. Il y a une victime dehors et un meurtrier en liberté. Mais c'est stimulant, c'est un défi pour les enquêteurs.»

Avec l'année qui s'achève, le commandant de la Section des crimes majeurs du Service de police de la Ville de Montréal, Clément Rose, fait la rétrospective des homicides survenus en 2009, à commencer par l'assassinat de Natasha Cournoyer au mois d'octobre.

 

C'est l'homicide le plus marquant des 12 derniers mois, reconnaît d'emblée le commandant, rencontré au début du mois dans son quartier général de l'est de Montréal.

Le policier décrit l'ambiance qui règne chez ses troupes lorsqu'un tel dossier est propulsé à l'avant-scène. Entre la découverte du corps de la femme de 37 ans sous un pylône électrique de Pointe-aux-Trembles et l'arrestation, un mois plus tard, du présumé meurtrier Claude Larouche, les troupes de Clément Rose - une trentaine d'enquêteurs - ont trimé, avec l'aide des policiers de Laval et de la Sûreté du Québec. Lorsqu'un crime gratuit résonne aussi fort aux quatre coins de la province, les gens, horrifiés, réclament un coupable à tout prix.

Diseuse de bonne aventure

Avec un tel mandat, la section des homicides se retrouve sur la sellette. «Ça ne veut pas dire que je prends les autres crimes à la légère, mais la situation nous force à nous organiser et à déployer tous les effectifs nécessaires. Je devais régulièrement rendre des comptes. On a reçu et vérifié près de 400 informations dans ce dossier, de la diseuse de bonne aventure qui voit des choses dans des feuilles de thé au témoin qui prétend avoir vu quelque chose de suspect», illustre M. Rose.

Les policiers ont réussi à remonter jusqu'à Larouche à partir des analyses de l'ADN prélevé sur le corps de la victime. Ces échantillons ont confirmé les doutes à l'égard de Larouche, un prédateur sexuel qui se trouvait apparemment déjà dans la ligne de mire des enquêteurs. «La preuve par ADN elle-même s'est améliorée au cours des dernières années. Sa précision a décuplé et permet de rouvrir de vieux dossiers», constate Clément Rose.

Une autre affaire a été menée rondement par le commandant Rose et ses hommes. À la fin du mois de novembre, les autorités ont signalé la disparition de Mohammed Nehar-Belaïd, 64 ans, un chauffeur de taxi de Saint-Laurent. Trois jours plus tard, son corps couvert de marques de violence a été trouvé dans un boisé à LaSalle. Encore trois jours et les enquêteurs des crimes majeurs passaient les menottes à Nigel Rudolph John, 26 ans. Le vol serait à l'origine de ce meurtre, élucidé en une semaine. À certains égards, la gratuité du crime et sa médiatisation rappelaient l'affaire Cournoyer.

Dix-sept meurtres résolus

L'escouade des crimes majeurs finit l'année sur une bonne note. Dix-sept des 31 homicides commis cette année ont été résolus, en plus de six meurtres survenus dans le passé, mais élucidés en 2009. Ce taux de résolution est semblable à celui des années passées. Quatorze dossiers font toujours l'objet d'une enquête.

Parmi les meurtres recensés, cinq impliquent des gangs de rue, trois découlent d'un règlement de comptes et 10 constituent le sombre dénouement d'épisodes de violence conjugale.

Les autres ont souvent dominé les manchettes pour leur caractère sauvage, gratuit et inusité. C'est le cas de cette femme de 67 ans morte après une chute provoquée par trois adolescents qui voulaient lui dérober son sac à main, en mai, à Montréal-Nord. Les trois jeunes, âgés de 15 et 16 ans, font actuellement face à la justice.

Autre incontournable dans cette liste noire: la découverte du corps de Jessica Neilson, en mars, abandonné dans sa voiture dans une ruelle du quartier Saint-Henri.

L'auteur de ce meurtre court toujours. «Nos enquêteurs ont procédé à une arrestation dans ce dossier, mais ont dû relâcher le suspect, faute de preuves», raconte Clément Rose.

Selon lui, les enquêteurs connaissent ou croient connaître les responsables de 80% des homicides. Le hic, c'est qu'ils doivent ensuite recueillir des preuves suffisantes pour pouvoir porter des accusations. «C'est parfois frustrant, mais il nous faut demeurer professionnels et productifs. On a tous des sentiments et des familles, mais nous devons suivre les règles, obtenir et présenter des preuves en béton», explique le commandant, qui compte 27 ans d'expérience dans la police.

Parmi les autres homicides qui ont marqué l'année, il y a l'histoire de ce poupon de 11 mois étranglé en juin par son père. Où celle de ce pauvre automobiliste battu à mort à coups de barre de fer lors d'un épisode de rage au volant qui a dégénéré, en juillet. Enfin, le mystère persiste également autour de la découverte du corps d'une femme enroulé dans un tapis à l'arrière d'un atelier de carrosserie du quartier Centre-Sud, au mois d'août.

Pour l'heure, le commandant Rose et ses troupes continuent de mener leurs enquêtes sur les dossiers non résolus.

Parce que le meurtre parfait n'existe apparemment pas.