Important revers pour la Ville de Montréal et son service de police: le coroner André Perreault a déposé en preuve les deux rapports internes du SPVM sur le profilage racial et le «racisme» de ses agents aujourd'hui à l'enquête sur la mort de Fredy Villanueva.

Alors que le contenu de ces rapports internes avait déjà été révélé par La Presse et Le Devoir,  la Ville de Montréal et son service de police continuaient à se battre bec et ongles pour empêcher leur dépôt en preuve à l'enquête du coroner.

> Lisez le rapport du criminologue Mathieu Charest

> Lisez le rapport du psychologue Martin Courcy

Ces documents sont «pertinents» à l'enquête puisqu'ils ont été commandés par le SPVM; qu'ils font référence directement à la mort de Fredy Villanueva et qu'ils ont été produits peu de temps après l'intervention policière qui a mal tourné, a tranché le coroner André Perreault, ce matin.

La recherche du criminologue Mathieu Charest, un employé du SPVM, révèle que dans les quartiers sensibles du nord de la métropole, la proportion de personnes noires interpellées est «alarmante». Comme la mort de Fredy Villanueva est survenue dans le contexte d'une «interpellation» policière, le coroner a jugé que cette étude pouvait l'aider à faire des recommandations pour une meilleure protection de la vie humaine.

Plus tôt aujourd'hui, la Ville de Montréal et son service de police ont tenté d'empêcher le dépôt en preuve des documents en les qualifiant de «dangereux» et de «préjudiciables» pour les agents Jean-Loup Lapointe et Stéphanie Pilotte.

Le rapport de Mathieu Charest est un «brouillon» qui n'a pas franchi avec succès les étapes nécessaires pour être utilisé par le SPVM, a plaidé l'avocat de la Ville, Me Pierre-Yves Boisvert.

«J'ignore pourquoi il est resté à l'état de brouillon. C'est un brouillon manifestement bien préparé, dans une forme très avancé», lui a répondu le coroner. De son côté, Me Alain Arsenault, avocat d'un des jeunes blessés par balle, a une théorie sur l'état «brouillon» du document. «Cette étude scientifique n'a pas été entérinée, car elle est dévastatrice pour le SPVM. La police avait peur des réactions que ça allait susciter dans le public», avance-t-il.

Un rapport sans valeur, selon le SPVM

La Ville a également descendu en flammes le second rapport que son service de police a lui-même commandé: le rapport du psychologue Martin Courcy. Les policiers font preuve de «racisme pur et simple» à l'égard des jeunes des minorités visibles à Montréal-Nord. Dans le contexte où les jeunes se sentent intimidés et provoqués par la police, «il n'est pas surprenant» qu'une émeute ait éclaté au lendemain de la mort de Fredy Villanueva en août 2008, conclut cet expert en gestion de crises.

Aux yeux de la Ville et de son service de police, le rapport de Courcy «ne vaut rien sur le plan méthodologique ni sur le plan scientifique». «Compte tenu de son degré de qualité, le SPVM considère que c'est dangereux de le mettre dans les mains du public», a ajouté Me Boisvert.

Les avocats de la Fraternité des policiers et des deux policiers impliqués dans l'événement du 9 août 2008 se sont opposés avec la même vigueur au dépôt des documents. Le rapport du psychologue Courcy est «superficiel» et «approximatif», a dit Me Pierre Dupras. Ce document est «farfelu», a ajouté Me Michael Stober de la Fraternité.

Ces documents sont préjudiciables aux agents Jean-Loup Lapointe et Stéphanie Pilotte puisqu'ils traitent de profilage racial, alors qu'il n'y a aucune preuve que les deux agents aient fait du profilage le 9 août 2008, ont argué les avocats des policiers.

De leur côté, les avocats de la famille Villanueva et des jeunes témoins du drame se sont réjouis de la décision du coroner. Ils se demandent aujourd'hui si la Ville de Montréal et son service de police possèdent d'autres documents internes qui pourraient faire avancer les travaux du coroner. «Jusqu'à maintenant, ils en ont caché au moins deux», a laissé tomber Me Alain Arsenault, avocat de Jeffrey Sagor Metellus.