À six mois du sommet de Copenhague sur les changements climatiques, nous venons (peut-être) d'entrer dans une nouvelle ère. Pour la première fois de l'histoire industrielle, en 2008, les investissements dans les énergies renouvelables (155 milliards $) ont surpassé ceux dans les énergies fossiles (122 milliards $). Les pollueurs d'hier deviendraient-ils les développeurs durables de demain?

L'écart devient encore plus marqué quand on ajoute les investissements dans les projets d'envergure en hydroélectricité : 39 milliards $. Nécessité fait foi de tout: ce sont principalement les pays émergents, la Chine, l'Inde et le Brésil, qui se tournent massivement vers les énergies renouvelables. Qui plus est, plusieurs compagnies, et pas des moindres, s'approvisionnent maintenant à 100% à l'éolien, au solaire et aux autres énergies non polluantes.

 

Il est tout de même ironique de constater que ce sont les entreprises qui se dirigent à toute vitesse vers ce point de bascule, alors que la plupart des gouvernements font encore du surplace. Elles n'ont guère le choix. Pour des raisons d'image, bien sûr, mais aussi parce qu'employés, clients, groupes écologiques et investisseurs, de plus en plus, exigent une production plus respectueuse de l'environnement.

Quelque 700 chefs d'entreprise, dont certains poids lourds comme Siemens, Pepsico et Ericsson, ont récemment réclamé des gouvernements un traité ambitieux de réductions des gaz à effet de serre. Un petit échantillon à l'échelle mondiale, certes, mais représentatif de l'émergence d'une nouvelle conscience.

Dans la foulée de cet appel, certains sont allés plus loin. Le Carbone Disclosure Project, qui représente 475 investisseurs institutionnels mondiaux, a dévoilé un modèle de lignes directrices sur les émissions de GES à inclure dans les rapports annuels des entreprises.

Tout ça ne surprend guère Jean Piette. «Plusieurs [administrateurs] se posent eux-mêmes des questions comme citoyens», remarque l'avocat de Québec, qui est aussi président du conseil d'administration du Conseil patronal de l'environnement du Québec (CPEQ).

Bien sûr, certains en profitent pour faire de l'écoblanchiment (green washing) et d'autres sont plus motivés par les enjeux financiers liés à un marché du carbone qu'aux considérations écologiques. Il note quand même un changement culturel important dans des entreprises comme Rona, Bombardier ou le Cirque du Soleil.

«Elles font encore des dommages, d'accord, mais pas de la même façon qu'avant. Il y a une réelle volonté d'atténuer les impacts et leur empreinte écologique au maximum», me dit-il. Les entrepreneurs répondent à d'autres types de signaux que les gouvernements, dont l'objectif, trop souvent, est de rester au neutre en mimant le mouvement.

«Ça prend une vision»

Évidemment, ce sont de grosses machines souvent soumises à une forme d'inertie créée par la résistance au changement, tant à l'interne (les fonctionnaires) qu'à l'externe (la population). N'empêche. Les politiciens n'ont plus vraiment le choix. La pression populaire se fait de plus en plus forte pour que nous réinventions la planète et les règles qui la gouvernent. «Une politique ne doit pas se limiter à donner des amendes. Ça prend une vision», prévient Me Piette.

Suggestion: ils n'ont qu'à regarder du côté de la déclaration commune d'une trentaine de chefs de file canado-américains en environnement et en conservation. Pour s'attaquer aux grands problèmes écologiques de notre temps, ils suggèrent sept pistes d'actions dont celle-ci: «Augmenter les investissements dans le secteur des énergies renouvelables, de l'efficacité énergétique et de la conservation de l'énergie. Ces investissements auront pour effet de favoriser la prospérité grâce aux nouvelles technologies et de stimuler la création d'emplois dans le secteur des énergies propres.»

Et ainsi émergeront de nouvelles façons de faire qui permettront de conserver les acquis de la modernité, sans la pratique de la terre brûlée actuelle.

Ce nouveau modèle, malgré toutes ses imperfections, s'avèrera certainement plus respectueux de l'environnement. Il subira encore quantité de soubresauts, en raison de la crise économique, notamment.

Mais il nous permet d'espérer un monde meilleur où nous cesserons d'hypothéquer l'avenir de ceux qui nous suivent.

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