La Ville de Laval vient de s'engager dans une course contre la montre afin d'être la première grande ville du Québec à cesser d'enfouir ses déchets. À la dernière réunion du comité exécutif de l'administration du maire Gilles Vaillancourt, les élus ont approuvé un plan d'affaires pour construire une usine de transformation des déchets par «biométhanisation et compostage» au coût de 112 millions. L'objectif : collecter et transformer 110 000 tonnes de déchets par année.

L'ambitieux projet, qui nécessite du financement de Québec et d'Ottawa dans le cadre du Fonds fédéral d'infrastructures vertes, a déjà été acheminé au bureau de la ministre de l'Environnement, Line Beauchamp. Selon ce qu'a appris La Presse, Québec serait prêt à dégager 42 millions si Ottawa fournit l'équivalent. Si tout va comme prévu, les travaux de construction de l'usine commenceront dans deux ans.

Joint hier, André Giroux, ingénieur spécialisé dans les déchets solides et responsable du dossier, a confirmé que toutes les études de faisabilité sont pour ainsi dire terminées. La Ville a même arrêté son choix sur son site de construction, montée Masson, dans l'est de Laval, sur un terrain public où se trouve l'usine d'épuration des eaux usées de La Pinière.

«Les grandes villes du Québec (Montréal, Québec et Longueuil) préparent probablement la même demande au moment où l'on se parle, a expliqué M. Giroux. Mais contrairement aux autres villes, nous, avec ce qu'on a sur la table, nous sommes prêts à aller en appel d'offres.»

Avec la nouvelle usine, où tous les déchets seront acheminés à part ceux destinés au recyclage, la Ville estime qu'elle traitera 40 000 tonnes de résidus (feuilles, gazon, résidus de jardins et résidus alimentaires) provenant d'immeubles de sept logements et moins. Les industries, commerces et institutions (ICI) seront mis à contribution avec un objectif de 25 000 tonnes par année. Et il est prévu de récupérer 45 000 tonnes de boues provenant de trois stations d'épuration et de fosses septiques.

Afin d'y parvenir, 110 000 bacs de 240 litres percés de trous d'aération seront distribués aux ménages de Laval. Le bac en question permettra de faire une collecte à trois voies. Une fois à l'usine, on estime que 80 % des déchets seront transformés en gaz naturel par biométhanisation (lire encadré), ce qui produira suffisamment de carburant pour alimenter 100 autobus durant un an. Le reste des déchets sera transformé en compost. On compte en produire 24 012 tonnes par année, l'équivalent du contenu de 2400 camions à ordures.

Le directeur du Front commun québécois pour une gestion écologiste des déchets (FCQGED), Karel Ménard, estime qu'il s'agit là d'une bonne nouvelle. «La collecte à trois voies permet de trier à la source. De plus, Laval va gérer ses déchets sur son territoire, ce qui occasionnera moins de transport.»

À ce chapitre, les études de l'ingénieur de la Ville de Laval, André Giroux, démontrent qu'on éliminera 779 tonnes de gaz à effet de serre année, sans compter les émanations évitées grâce à la fin de l'enfouissement et la production de gaz naturel.

L'administration Vaillan¬court a pour objectif de produire du compost de haute qualité (catégorie AA), mais on admet que celui qui proviendra des boues servira à la revégétaliser des sites miniers ou d'anciennes carrières.

À la Ville de Montréal, le responsable du dossier, Alan DeSousa, a dit qu'un site est envisagé pour la construction d'une usine «mais qu'il y a encore des études à réaliser».

«Nous avons été la première ville au Québec à adopter un plan directeur de gestion des matières résiduelles. Il a été approuvé le 11 septembre dernier. Un projet de 128 millions, pour 202 000 tonnes. N'allez pas dire que Laval est la première ville à construire son usine», a prévenu M. De Sousa.

De son côté, Robert Bordeleau, candidat du Parti au service du citoyen à la mairie de Laval, estime que le projet arrive tard. «Pourquoi toujours attendre les fonds pour agir ? demande-t-il. La technologie existe depuis longtemps. Et surtout, je me demande pourquoi le projet voit le jour durant la campagne électorale.»