Derrière la crise du climat s'en profile une autre, moins visible mais tout aussi grave, celle de l'extinction des espèces, véritable bombe à retardement qui a incité l'ONU à proclamer 2010 «année internationale de la biodiversité».

Le constat global est accablant: près d'un quart de toutes les espèces vivantes, animales et végétales, pourrait disparaître d'ici le milieu du siècle sous la pression des activités humaines.

Les mammifères sont particulièrement concernés avec une espèce sur deux en déclin, selon la «liste rouge» de l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), organisation de référence en matière de biodiversité.

Les scientifiques estiment que la «sixième extinction massive» des espèces est en marche, la dernière ayant vu la disparition des dinosaures il y a 65 millions d'années.

Pourtant, cette crise de la biodiversité est «inaudible», déplore Chantal Jouanno, secrétaire d'État française à l'Écologie, soulignant que «tout a été focalisé sur le climat».

Lors du sommet de la Terre de Johannesburg, en 2002, les dirigeants de la planète s'étaient engagés à «ralentir significativement» d'ici 2010 l'érosion de la biodiversité.

Un objectif qui est loin d'être atteint, selon l'UICN.

«L'homme n'a pas encore compris sa dépendance à l'égard de la biodiversité», estime Mme Jouanno, alors qu'il s'agit d'un enjeu crucial sur des problématiques telles que l'alimentation, la santé ou encore l'approvisionnement en eau potable.

Pour bon nombre d'experts, cette crise gagnerait en visibilité si elle bénéficiait d'un mécanisme international d'expertise à l'instar du Groupe intergouvernemental d'experts sur l'évolution du climat, qui a obtenu le Prix Nobel de la paix en 2007 avec l'ancien vice-président Al Gore.

La création d'un GIEC de la biodiversité -l'Ipbes (Plate-forme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques) -devrait être effective en 2010, selon Mme Jouanno.

L'idée en avait été approuvée en mai 2008 lors d'une réunion des Nations unies mais de nombreux blocages sont apparus depuis, certains pays du Sud craignant une ingérence des pays du Nord dans la gestion de leur patrimoine naturel.

Parallèlement, les grandes expéditions naturalistes, en vogue au XIXe siècle mais tombées un peu en désuétude à la fin du XXème, viennent d'être relancées.

Le Muséum national d'histoire naturelle (MNHN), l'ONG Pro-Natura international et l'UICN, ont annoncé un programme sans précédent de missions d'inventaire sur les «points chauds» de la biodiversité, en Amazonie, en Afrique, à Madagascar, avec la participation d'une centaine d'experts de 15 pays.

«Beaucoup d'espèces dans le monde risquent de disparaître avant même d'avoir pu être découvertes», estime Bertrand-Pierre Galey, directeur général du Muséum.

Selon les scientifiques, il y aurait entre 8 et 30 millions d'espèces vivantes pour seulement 1,8 million connues à ce jour.

Deux grandes conférences de l'ONU concernant la biodiversité sont programmées en 2010, la CITES, qui publie la «liste rouge» des espèces menacées interdites de commercialisation du 13 au 25 mars à Doha (Qatar) et la 10e conférence de la Convention sur la diversité biologique (CBD) du 18 au 29 octobre à Nagoya (Japon).