Le Canada fait piètre figure en matière d'économie verte, selon un nouveau rapport critique à l'égard de la politique environnementale du gouvernement de Stephen Harper.

Parmi les pays du G8, le Canada est celui qui a connu la plus forte augmentation relative de ses émissions de gaz à effet de serre entre 1990 et 2007, «un résultat inquiétant en termes de son incidence sur la compétitivité future dans un monde faible en carbone», note le rapport de la Table ronde nationale sur l'environnement et l'économie (TRNEE).

 

L'équipe d'experts a mis sur pied un «Indice de rendement à faible production de carbone», qui évalue, pour chaque pays du G8, cinq critères: émissions et énergie, innovation, compétences, investissement, et politiques et institutions.

Globalement, le Canada se classe au sixième rang, devant l'Italie et la Russie, mais loin derrière la France, l'Allemagne et le Royaume-Uni, et juste après le Japon et les États-Unis. Le Canada se retrouve en bonne position pour l'innovation et les compétences, mais il accuse un retard en matière de politique de réduction des émissions et de productivité en carbone.

De sorte que la TRNEE sonne l'alarme. Pour infléchir sa courbe d'émissions de gaz à effet de serre et «réaliser des réductions significatives», le Canada devra effectuer «une transformation substantielle des modes de production et d'utilisation de l'énergie».

«En matière de rendement à faible carbone, il y a place à l'amélioration, ajoute le groupe d'experts en conclusion. Nos concurrents, sauf les États-Unis pour le moment, investissent tous davantage et préparent leur économie à la transition vers une faible émission de carbone.»

David McGuinty, critique libéral en matière d'environnement, estime que le Canada n'est tout simplement «jamais entré» dans la course mondiale à l'économie propre: «Il n'y a pas de mystère. Ce n'est pas surprenant du tout. Le gouvernement a maintenant une cible de 17% de réductions. Mais où est le plan pour atteindre cet objectif? Ça fait bientôt 54 mois qu'on l'attend.»

Le changement de cap préconisé dans le rapport est «urgent», selon les partis de l'opposition à Ottawa, qui réclament depuis longtemps des actions plus vigoureuses en environnement.

«Les décisions du gouvernement conservateur, dans les deux derniers budgets, ont tué la compétitivité du Canada en technologies vertes, estime la députée néo-démocrate Linda Duncan. Qu'est-ce qu'il faudra pour que ce gouvernement comprenne qu'il est en train de faire mal à l'économie canadienne?»

Selon le député bloquiste Bernard Bigras, la situation ne fera qu'empirer pour le Canada, surtout depuis l'arrivée de Barack Obama à la présidence américaine.

«Les États-Unis investissent 10 fois plus par habitant dans l'efficacité énergétique et vers une économie plus verte, a souligné M. Bigras. Il risque d'y avoir bientôt un écart de compétitivité important entre le Canada et les États-Unis si le Canada refuse de se ranger derrière cette prospérité climatique.»

De passage dans en Alberta, le ministre Jim Prentice a rejeté catégoriquement les conclusions du rapport et critiqué vivement la méthodologie utilisée par la Table, dont les membres sont toutefois nommés par le gouvernement.

«Le rapport critique durement le Canada parce qu'il vend de l'énergie aux Américains, mais il applaudit lorsque les États-Unis consomment de l'énergie canadienne, a dit M. Prentice. Je ne comprends pas comment on peut faire ça.»

«Le rapport passe sous silence l'accord de Copenhague et les normes que nous avons adoptées depuis», a-t-il ajouté, précisant que la forte augmentation des émissions de gaz à effet de serre, que les auteurs qualifient d'«inquiétante», est en fait imputable à la croissance de la population canadienne et de son économie.