Un des deux grands spécialistes universitaires qui ont révisé un rapport publié il y a quelques jours par Greenpeace prend ses distances avec la demande de l'organisme de créer deux grandes aires protégées. «J'ai commenté ce rapport pour aider à ce que le contenu scientifique soit correct, a affirmé Yves Bergeron, de l'Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue, titulaire de la Chaire industrielle en aménagement forestier durable. Je pense que le rapport est relativement bien fait, mais je ne prends pas position en faveur des demandes qu'il contient.

«Je n'endosse pas le fait qu'il faille créer absolument des aires protégées dans la forêt intacte. Mais si on n'arrive pas à remplir nos objectifs de conservation avec l'aménagement écosystémique de la forêt, on devra peut-être en créer.»

 

Dans son rapport intitulé Refuge Boréal, Greenpeace identifie deux zones situées dans la forêt commerciale, mais relativement peu perturbées jusqu'ici par l'industrie.

La plus grande, celle de la Vallée de la Broadback, s'étend sur 23 000 km2, au nord de Matagami et au nord-ouest de Chibougamau. L'autre zone, celle des Montagnes blanches, est située entre le lac Mistassini et le réservoir Manicouagan. Elle s'étend sur 14 000 km2.

«Si on devait effectivement créer des aires protégées, je n'irais pas jusqu'à dire que c'est exactement là qu'il faudrait le faire, dit M. Bergeron. C'est au gouvernement de décider.» L'autre expert qui a révisé le rapport de Greenpeace, Christian Messier, directeur du Centre d'étude de la forêt de l'UQAM, a moins de réticence à appuyer les demandes de Greenpeace.

«Je pense qu'on doit avoir des aires protégées de toute façon, même si on fait de l'aménagement écosystémique de la forêt, dit M. Messier. Les aires identifiées par Greenpeace sont très intéressantes, même s'il y en a peut-être d'autres.

«Dans le passé, j'ai critiqué Greenpeace pour son utilisation malhonnête de la science, dit-il. Je leur ai dit: «À l'avenir envoyez-moi vos rapports, je les réviserai.» Globalement, j'apprécie ce rapport. On s'en va dans la bonne direction avec l'utilisation de la science pour la prise de décision. Mais il ne s'agit pas de mon rapport conjoint avec Greenpeace, un groupe de pression, tout comme je ne ferais pas un rapport conjoint avec l'industrie forestière.»